Un réformateur et la science

 

Salam Kawakibi*

 

Abstract: ‘Abd al-Rahmân al-Kawâkibî is one of the Syrian intellectuals who, at the end of the xixe century, took refuge in Egypt with a view to escaping from the Ottoman Sultan’s authoritarianism. Through many articles and books, he developed a political thought related to the relationship between power and religion. His thought argues that the cause of the decline of the Muslim countries lies in the deprivation of the “rights of reason.” In his view, the submission to a despotic government and the development of modern sciences are not at all compatible with each other; the latter are generally viewed as a threat by despots, for whom ignorance is the best option. Consequently, to his mind, the dissemination of knowledge among the people is the only way to lead to freedom as well as to the emancipation of mankind, as opposed to an illegitimate power which distorted religion to serve its own interests.

 

Résumé : ‘Abd al-Rahmân al-Kawâkibî fait partie des intellectuels syriens qui, à la fin du xixe siècle, se réfugient en Egypte pour échapper à l’autoritarisme du Sultan ottoman. À travers de nombreux articles et ouvrages, il développe une pensée politique qui réfléchit sur les rapports entre pouvoir et religion et qui voit dans la négation des « droits de la raison » la cause de la décadence des pays musulmans. Pour lui, il existe un incompatibilité absolue entre la soumission forcée à un pouvoir despotique et le développement des sciences modernes, ces dernières étant généralement perçues comme une menace par des despotes, pour lesquels la meilleure alliée reste l’ignorance. Ainsi, à ses yeux, seule la diffusion des savoirs au sein de la population peut aboutir à une réelle libération et à l’émancipation des individus par rapport à un pouvoir illégitime qui a dénaturé la religion pour servir sa cause.

 

Une vie, un engagement, une œuvre

Né à Alep le 9 juillet 1855 dans une famille de scientifiques et de religieux installée dans cette ville depuis le xive siècle, Al-Kawâkibî suit ses études dans l’école al-Kawakibîya dirigée par son père, enseignant de la mosquée Ommayade d’Alep et fondée par son grand-père en 1882. Dans cet établissement, il étudie en particulier les sciences juridiques et l’histoire, ainsi que l’arabe, le turc, le persan et la théologie. L’étude des sciences littéraires ne réussissant pas à satisfaire son intérêt pour la science, il s’oriente vers des études dans le domaine des sciences exactes. Il étudie ainsi la physique et les sciences naturelles. À la fin de son adolescence, il va parfaire sa formation à Antioche dans la famille de sa mère.

Al-Kawâkibî entame sa vie publique à l’âge de vingt et un ans en travaillant dans le journal officiel du wilayat d’Alep, al-Furât, où il publiera des articles durant cinq ans. Par ailleurs, il s’occupe des problèmes des plus faibles et des opprimés en ouvrant un bureau spécialisé dans la rédaction de pétitions des citoyens désireux de faire parvenir leurs doléances à la Sublime Porte. Dans ce même bureau, il s’occupe à donner des consultations juridiques gratuites. Ce travail lui vaut le surnom du « père des exclus » (Abû al-mahrûmîn). Dans les plaintes qu’il rédige, al-Kawâkibî exprime son mépris pour le despotisme sous toutes ses formes.

Son activisme social se traduit également dans les contacts directs qu’il entretient avec les étudiants de la mosquée qui porte son nom, ainsi que par les cours qu’il leur adresse. Al-Kawâkibî poursuit le chemin miné de la réforme dans un climat d’hostilité de la part des autorités ottomanes et face à une attitude conservatrice de la société, attitude qu’il attribue en grande partie à l’hégémonie d’une pensée religieuse obscurantiste.

Son désir d’être utile le pousse à occuper des postes importants dans le domaine public à partir desquels il essaye de mener sa lutte politique d’une façon pacifiste et constructive, ce qu’il souligne en disant : « Le despotisme ne se combat pas par la violence mais pacifiquement et progressivement » (Al-Kawakibi, 1995 : 531). Il devient membre du tribunal de commerce à Alep, puis maire de la ville en 1893, avant d’être limogé peu de temps après en raison des mesures réformistes prises au sein du système municipal. Sa nomination en tant que maire était la première pour un arabe depuis la tutelle ottomane sur la ville. Son travail en tant qu’avocat et notaire l’amène à occuper le poste de président de la chambre des notaires en 1894 (Al-Kawakibi, 1995 : 40). S’ajoute à toutes ces responsabilités dans le domaine public son élection à la tête de la chambre de commerce, d’agriculture et d’industrie d’Alep, sans même qu’il fasse partie du corps professionnel de cet organisme.

Dans sa quête d’une société plus éclairée et moins soumise à l’influence de la pensée de l’oppresseur, al-Kawâkibî entreprend de publier son propre journal. Il est le premier Syrien à publier un journal à Alep (Dayeh, 1984 : 13). Al-Chahbâ’ (la “rousse”, le surnom d’Alep) paraît le 28 avril 1877. Dès le premier numéro, Al-Kawâkibî souligne l’objectif de son action et la ligne politique et sociale de son engagement qui l’a amené à éditer ce journal :

« Ce journal arabe, aux contenus éducatifs, est fondé en vérité pour faire connaître les événements politiques et les situations sociales, accompagnés d’une analyse. Recherches et articles utiles à l’élargissement des connaissances et de l’éducation civique, dévoilant le sens des choses, répandant de la lumière dans l’esprit de l’opinion publique, soutenant l’État dans son œuvre de réorganisation des activités politiques locales et dans sa lutte contre les injustices. Le succès de nos initiatives dépend de leur soutien [celui des citoyens] c’est à eux que nous adressons notre appel afin qu’ils tirent profit de l’expérience de ceux qui nous ont précédés et qui ont tracé la voie du progrès, des connaissances, de la civilisation. Conscients qu’il faut pousser les administrateurs à se mettre au service de l’intérêt public comme il en est dans les nations européennes, le moins que nous puissions faire, c’est que la presse devienne un service public et un instrument d’utilité publique. »[1]

Cet espoir avorte rapidement du fait de la ligne engagée du journal et de son éditeur contre le despotisme et l’autoritarisme. Les autorités ordonnent la suppression du titre après seulement seize numéros. Il publiera un deuxième journal Al-I’tidâl (la modération) le 25 juillet 1879 après avoir importé une imprimerie en pierre d’Istanbul en 1879 (Dayé, 1984 : 13) ; mais ce titre subit le même sort que le précédent après seulement dix numéros. Dans sa lutte acharnée contre le despotisme et ses manifestations, il subit alors plusieurs formes de répression qui vont de la tentative d’assassinat dans les ruelles d’Alep à deux emprisonnements pour ses écrits et ses prises de positions. Le premier emprisonnement suscite la première manifestation de femmes dans le monde arabe et musulman en 1899 (Al-Ghazzi, 1955 : 57). Les autorités ottomanes ordonnent également la confiscation de tous ses biens.

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Entre 1898 et 1900, al-Kawâkibî effectue de multiples voyages qui l’amèneront dans toute la péninsule arabique, l’Asie centrale, l’Inde et sur les côtes est de l’Afrique. De cette activité, il tire le titre du Rahhâla Kâf (le voyageur K.) avec lequel il signe plusieurs de ses écrits. Durant sa visite des côtes est de l’Afrique, il développe une réflexion sur l’esclavage par rapport à l’Islam. Il profite de ses voyages pour tisser des contacts avec les élites des pays visités afin de mettre sur pied un réseau islamique susceptible de trouver une solution adéquate aux problèmes politiques, économiques et sociaux des Musulmans. Cette activité lui inspire le sujet de son deuxième livre, Umm al-qura (la mère des cités).

Face aux sanctions visant à le réduire au silence, il choisit finalement l’exil en mai 1900 (Al-Kawakibi, 2000 : 100) et s’installe en Égypte, où il rejoint le cercle des intellectuels syriens. Il est alors contacté par Muhammad ‘Abdû, chargé par le Khédive ‘Abbâs de l’approcher et de l’introduire dans son cercle. Il fréquente ainsi les Syriens exilés en Égypte, comme Rachîd Ridâ, ‘Abd al-Qâdir Qabbâni, Mohamad Kurd ‘Alî, Ibrâhîm Najjâr, Tâhir al-Jazâ’irî et ‘Abd al-Hamîd al-Zahrâwî. C’est avec Ridâ que les échanges intellectuels sont les plus fréquents, notamment dans les pages d’al-Manâr. L’idée de la laïcité les sépare, mais sans pour autant rendre leurs échanges tendus. Le troisième journal qu’il lance au Caire sera, lui aussi, suspendu, cette fois par le Khédive lui-même, craignant la colère du sultan ottoman ‘Abd al-Hamîd. L’existence de ce journal, al-’Arab (les Arabes), a été dévoilée en 1998 par une inscription trouvée dans les archives de la famille à Alep et confirmée scientifiquement et matériellement par l’étude de Jean Dayé (2000). Malgré les interdictions, les jugements, les emprisonnements et l’exil, ce réformateur syrien continue à entretenir une activité intellectuelle toujours vivace et une pensée qu’il essaye de faire circuler par tous les moyens possibles.

Le jour de sa mort, le 14 juin 1902, il est invité par le Khédive ‘Abbâs dans le palais de ce dernier à Alexandrie. Le Khédive essaye de le convaincre de modifier son attitude critique envers la Sublime Porte et de se réconcilier avec le sultan. Pour ce faire, il lui propose de l’accompagner pour une visite à Istanbul. Le refus du Kawâkibî est inébranlable. La discussion se tourne à la dispute et il quitte le palais laissant le Khédive mécontent. Le soir même au Caire, il rejoint ses amis dans un café et il raconte l’histoire en buvant dans une tasse empoisonnée par les agents du sultan. Avant de mourir, il dit à ses compagnons : « Ils m’ont assassiné ! »

La volonté de s’exprimer et de traduire sa pensé en écrits était aussi forte que la répression dont il a été l’objet. Sa vision de la presse est plutôt utopique. Il lui attribue des tâches en liaison avec les besoins de l’époque, et la définit comme une entreprise morale :

« Son objectif est d’être au service de l’humanité. Cela implique les tâches suivantes : correction des dérives, rassemblement des idées constructives, dénonciation des aspects négatifs de la société, renforcement des aspects positifs. Elle doit aussi défendre la justice et les droits. »[2]

Dès lors, elle assume une fonction publique et le citoyen la considère comme un service public qui prescrit le bien.

L’interdiction de ses écrits en Syrie et au Liban et la suspension de ses deux titres de journaux ne l’ont pas empêché de développer sa production intellectuelle qui s’exprime sous la forme de très nombreux articles, parus notamment dans la presse émigrée, au Caire, à Beyrouth et à Londres (cf. liste en annexe). Cette intense activité journalistique est approfondie par la rédaction d’ouvrages. Son premier livre, Umm al-qura (la mère des cités), est une conférence imaginaire où se rencontrent des représentants des Musulmans pour examiner la crise de leur religion et trouver des solutions qui feront de celle-ci un moyen d’émancipation et non pas de répression et de décadence. Ce livre regroupe des articles publiés dans la presse égyptienne en 1899.

Son deuxième livre Tabâ’i’ al-istibdâd wa masâri’ al-isti’bâd (les caractéristiques du despotisme et les luttes contre l’assujettissement) est également un recueil d’articles publiés dans Al-Mu’ayyad (le soutenu) au Caire entre 1900 et 1902. Ces articles ont été repris, et le résultat traduit une évolution et un affermissement de la réflexion et de la méthode. Cette œuvre est une apologie de la liberté au sein d’une société arabo-musulmane qui vit, selon l’auteur, sous un régime de despotisme accentué. L’auteur tente d’analyser la philosophie même de ce despotisme en distinguant entre ses diverses formes et catégories et en consacrant à chacune un chapitre. Le livre s’interroge tout d’abord sur ce qu’est le despotisme et sur sa relation avec la religion, avec la science, avec la gloire, avec la finance, avec la morale, avec l’éducation et avec l’émancipation. Un chapitre à la fin de ce livre est consacré à la procédure à suivre pour se débarrasser de ce despotisme. Dans ce même livre, al-Kawâkibî donne la parole au despote qui se présente de la façon suivante :

« Je suis le mal, mon père est la répression et ma mère l’austérité. Mon frère est la trahison, ma sœur, c’est la mesquinerie, mon oncle, c’est le dégât, mon fils, c’est la dénuement, ma fille, c’est le chômage, ma tribune, c’est l’ignorance, mon pays, c’est les ruines, ma religion, mon honneur et ma vie, ce sont l’argent. » (Al-Kawakibi, 1995 : 473)

S’ajoutent à ces deux titres plusieurs œuvres qui n’ont pas pu voir le jour à cause de la confiscation de ses papiers et de ses manuscrits par les autorités ottomanes. C’est le cas du Sahâ’if Quraych (les papiers de Quraîych), volé par les agents du sultan juste après l’assassinat d’al-Kawâkibî. C’est également celui d’écrits comme Al-’Azama li-Lâh (La gloire est pour Dieu), mentionné par Muhammad Kurd ‘Alî dans ses mémoires, Amrâd al-muslimîn wa al-adwya al-châfiya laha (Les maladies des Musulmans et les médicaments qui y remédient), Ahsan ma kân fî asbâb al-’Umrân (Le meilleur dans la construction) et Mazâ asâbanâ wa kayf al-Salâma[3] (Qu’est ce qui nous est arrivé et comment trouver le salut ?).

Liberté de penser, liberté d’expression

Nous tenterons de lire les textes d’al-Kawâkibî comme le résultat d’une action morale et politique, comme le produit d’un plan visant à atteindre le but désiré : la transformation dans un sens moderne, c’est-à-dire libéral, de l’État islamo-ottoman et de la société arabo-musulmane.

Afin d’entamer son cheminement intellectuel sur des bases claires à partir d’un vocabulaire précis, al-Kawâkibî définit ses outils conceptuels en commençant par les deux expressions qui lui importent le plus, à savoir, la politique et le despotisme. La politique est définie par lui comme « l’administration (idâra) des affaires communes avec sagesse (hikma) » (Al-Kawakibi, 1995 : 433). En revanche, le despotisme représente pour al-Kawâkibî « la conduite (al-tasarruf) dans les affaires communes suivant le caprice (al-hawa) » (idem). Au delà des définitions, la distinction s’effectue également par l’analyse qui mobilise des idées simples au service d’une réflexion complexe.

Le régime recommandé par al-Kawâkibî doit être fondé sur le développement de l’esprit de liberté, sur le droit, la consultation des gouvernés et le contrôle des gouvernants par le peuple. Pour y parvenir, al-Kawâkibî préfère à la violence un processus d’éducation des gouvernés et des gouvernants pour amener les uns et les autres à apprécier la liberté, étant donné qu’« avant de combattre le despotisme, il faut préparer ce par quoi il doit être remplacé » (idem : 529). Il compte donc avant tout sur la réforme de l’enseignement et des institutions pour en finir avec le despotisme.

Le besoin d’une telle réforme doit être ressenti par la communauté qui va être l’outil et l’objet même de cette réforme. De fait, « si la nation par sa globalité ou par une partie ne ressent pas les maux du despotisme, elle ne mérite pas la liberté » (idem). Dès lors, l’action doit être collective afin d’assurer sa réussite. Le citoyen, à force de subir sans résistance la calamité du pouvoir, s’habitue à cette situation et ne tente guère de la changer. Comme l’écrit al-Kawâkibî : « On a coutume de dire : si je reste malade pendant longtemps, je finis tellement par m’habituer à ma maladie que, une fois guéri, mes membres continuent à souffrir » (idem).

Face à la monté de l’intégrisme et à son utilisation par les pouvoirs politiques afin de réduire les opposants au silence au nom de la religion, al-Kawâkibî observe que l’Islam est une religion « pure, sage, qui ne complique pas la vie, libérale et tolérante » (idem : 451). Elle n’est en rien responsable de ce que les religieux essayent de lui faire dire afin d’en faire outil de pouvoir, d’obscurantisme et de répression. L’Islam est fondé sur le principe de la liberté, « antidote à la domination et au pouvoir arbitraire » (idem : 450). Le droit chemin que la religion doit indiquer se définit par « la justice, l’égalité, l’équité et la fraternité » (idem). Dès lors, al-Kawâkibî souligne que les principes fondamentaux du rapport entre Dieu et le croyant sont également à la base d’un « lien qui donne à chacun la même dignité » (idem : 447).

Il poursuit l’idée de promouvoir un système politique moderne optant pour une forme de représentativité. Tout gouvernement dans les pays musulmans est invité à se « fonder sur le système consultatif-représentatif, parce que celui-ci est soutenu par la primauté de l’intellect, l’administration de la communauté/nation étant en harmonie avec la législation démocratique, c’est-à-dire participante » (idem : 450). Cette forme de gestion politique prive les gouvernants du monopole du pouvoir et les incite à respecter la volonté de leur population représentée dans les assemblées. Elle diminue ainsi l’influence des religieux sur le processus de la prise de décision au sein des gouvernements. En effet, al-Kawâkibî s’alarme de l’influence accrue des religieux sur la scène politique et de leur monopole de l’interprétation religieuse ; une interprétation souvent fausse, qui accentue, selon lui, les maux de la société arabo-musulmane et entrave toute tentative éclairée et réformiste.

La réforme, ou la séparation entre pouvoir et religion

Lorsqu’un pouvoir despotique s’appuie sur le pouvoir religieux pour affirmer sa suprématie et bloquer les réformes nécessaires à la société, la religion devient un instrument vicieux auquel Al-Kawâkibî s’oppose catégoriquement. Pour lui, le refus de soutenir les réformes préconisées par une élite éclairée, le rejet du principe même d’une réorganisation, l’indifférence face au viol de la loi par ceux-là même qui administrent la communauté, tout cela

« découle du rôle conservateur des hommes de religion qui tiennent davantage à conserver leurs vieux privilèges qu’à appuyer un nécessaire changement. Personne n’ignore l’influence qu’ils ont sur l’opinion publique, mais aussi sur certains hommes politiques, avec qui ils partagent les mêmes intérêts. Ce qu’il faut donc c’est priver ces représentants religieux de tout pouvoir, puisqu’ils n’ont aucun intérêt à ce que les gens apprennent à penser d’une nouvelle manière, mais veulent au contraire les laisser dans une ignorance crasse qui, non seulement rend l’homme esclave et disciple fanatique de ces hommes qui défendent leurs propres intérêts, mais, pis encore, le rend fier de sa corruption et du lieu commun qui affirme : je suis né comme ça ! » (idem : 440)

L’origine de tous les maux de la société se trouve dans la mauvaise gestion de la politique, et c’est également dans celle-ci qu’il faut « rechercher les racines de la détérioration de la façon de penser et de se conduire, surtout en ce qui concerne les comportements politiques » (idem). Al-Kawâkibî constate l’inertie pesante de l’Empire et son incapacité à mener des réformes significatives : « Ce n’est pas par hasard que l’on se retrouve, quatre siècles plus tard, à devoir encore subir l’oppression à laquelle nous nous sommes habitués et qui a même modelé le caractère des individus » (idem).

Le soutien que les religieux apportent au pouvoir despotique, au nom de la religion, constitue l’un des objets de réflexion d’Al-Kawâkibî. Soulignant l’absence de clergé en Islam, il en conclut qu’aucune autorité religieuse ne peut être « exercée d’une façon absolue » (idem : 450). Le rôle d’une telle autorité se limite à l’élaboration d’une discipline pour l’exercice du culte. Ceux qui étudient et interprètent la religion doivent donc prendre des distances avec le pouvoir : « Voilà pourquoi l’Islam n’a jamais représenté un obstacle à la lutte contre le despotisme » (idem). Malgré cette argumentation concernant l’Islam, al-Kawâkibî exprime fermement sa conviction que des règles doivent être édictées pour séparer le pouvoir politique de la religion. Il suggère un khalife pour les Musulmans sans distinction, à l’instar du Pape ; un Khalife élu par un conseil qui l’assiste et dont les membres sont des représentants élus des Musulmans des différents pays. Le Khalife et son conseil qui siègeraient à la Mecque, « auront à s’occuper de l’administration des lieux saints et des affaires religieuses et ne devront jamais intervenir dans les affaires administratives et politiques des gouvernements des pays musulmans »[4]. À la suite de cette proposition de séparation affirmée entre religion et pouvoir, al-Kawâkibî pensait s’attirer les foudres de ceux qui voyaient dans le retrait de la religion une cause majeure de décadence de la société. Quant à lui, il avance que la vraie raison de la décadence orientale « est due au despotisme et son seul remède, c’est la liberté. La meilleure forme en est la démocratie constitutionnelle »[5].

Dans une zone du monde où les conflits religieux peuvent éclater pour une raison ou une autre, et où les forces étrangères ne se privent pas d’attiser les tensions, al-Kawâkibî privilégie l’union, la « lutte » pour réaliser l’union nationale. Il formule solennellement un appel à ses concitoyens : « Laissez-nous résoudre notre vie profane en neutralisant les religions qui auront leur rôle à jouer à l’Au-delà. Laissez-nous nous rassembler autour de ces mots : vive la nation, vive la patrie et que nous vivions libres et dignes » (Al-Kawakibi, 1995 : 515). Il a la certitude que l’édification d’une conscience nationale dans une région où les religions se disputent l’histoire et l’espace ne peut pas être conçue sans une séparation entre religion et pouvoir, ainsi que l’abolition de la dénomination « musulman » et « non-musulman », de façon à créer un sentiment commun dépassant les races et les confessions. Poursuivant cette réflexion, il ressent le besoin d’un discours rassemblant la société et réduisant à néant les causes d’éclatement. Il s’adresse dès lors aux non-musulmans en disant :

« Ecoutez-moi, vous les Arabes parmi les non-musulmans, j’en appelle à vous pour oublier les offenses, les haines et ce que les ancêtres ont commis. Les diviseurs en ont assez profité. Votre devoir à vous, les premiers éclairés, est de trouver les moyens de l’union. » (Al-Kawakibi, 1995 : 515)

L’expérience des Occidentaux, qui ont eu à surmonter tant de clivages religieux et ethniques, lui semble intéressante à suivre, ainsi

« l’Autriche et l’Amérique, que la science a guidées par des chemins divers vers des principes solides pour l’union de la patrie par delà la religion, vers la concorde nationale par delà les divisions confessionnelles, vers l’établissement de liens politiques sur un fond de diversité administrative ! Pourquoi ne choisissons-nous pas une voie similaire afin que nos penseurs puissent dire aux attiseurs de la haine : laissez-nous gérer notre vie ici-bas et réservez la religion à la gestion de l’Au-delà ! » (Al-Kawakibi, 1995 : 515)

Afin de mener cette action et de réussir sur le terrain miné des religions et d’une tradition populaire influencée par l’ignorance et la répression, al-Kawâkibî s’appuie sur le devoir de l’élite « de souligner pour le public la nécessité de la séparation entre la religion et l’État »[6].

« L’intellectuel diffuse la science et le despote s’efforce d’éteindre sa lumière »

L’élite à laquelle pense al-Kawâkibî, ce sont avant tout les intellectuels qui ont à ses yeux une lourde responsabilité :

« Les Orientaux, musulmans, chrétiens, juifs et bouddhistes, ont besoin d’intellectuels qui se distancient de la propagande religieuse, des ignorants et de leur discours répressif. Ils sont appelés à renouveler le regard vers la religion. » (Al-Kawakibi, 1995 : 493)

Ce travail doit se traduire par une implication directe dans l’économie, la politique et surtout dans la religion qui, à défaut, ne sert que les dirigeants. Dès lors, les intellectuels « devront réactiver des parties abandonnées et supprimer les parties ajoutées » (idem) de la religion. Il souligne ainsi un phénomène qui touche toutes les idéologies, y compris les religions : le vieillissement. Pour cette raison, « elles ont besoin de rénovateurs et de réformateurs […] » (idem).

Pourquoi donc s’appuyer sur une élite éclairée et érudite et quel doit être le rôle du citoyen ? S’interrogeant à ce sujet, al-Kawâkibî déplore l’indifférence des citoyens qui relève parfois du désengagement involontaire ; et s’il se trouve en butte à la répression, « le citoyen s’aveugle, il ne réclame plus ses droits et il s’efface complètement »[7]. Les intellectuels ont ainsi à subir non seulement la répression du despote, mais aussi l’incompréhension d’une grande partie de la population que son ignorance conduit à l’indifférence. La tâche est donc redoublée pour l’intellectuel réformateur, puisque « quand un sage se trouve au milieu d’une caravane d’égarés, il a le devoir d’intervenir et de les conduire vers le salut, quitte à subir leur agressivité » (Al-Kawakibi, 1995 : 439). Cette analyse conduit al-Kawâkibî à mettre l’accent sur le rôle qui doit être joué par la société civile. Il sera le premier à se définir en tant que membre actif d’une société civile et il affirme que c’est un devoir civique pour l’élite de prendre part à l’effort de réforme.

Si la cause fondamentale de l’indifférence populaire est l’ignorance, il faut y remédier par la propagation de la science, car « le prix du despotisme est celui de l’ignorance sur la science » (Al-Kawakibi, 1995 : 441). Dans une lettre adressée d’Alep à son fils aîné, étudiant en médecine à Istanbul, il l’incite à faire des études approfondies en suivant une spécialité. Il l’encourage à développer sa connaissance des langues, en commençant par le français qui facilitera « l’apprentissage de l’anglais, très important pour acquérir des connaissances ainsi que pour la politique […] »[8]. Al-Kawâkibî souligne le rôle important que la science et l’apprentissage de la science peuvent jouer dans la réforme de la société, à un moment où l’humanité traverse une période transitoire de son histoire, marquée par les inventions techniques et la révolution industrielle. Il confirme cet intérêt dans une de ses correspondances avec son fils pour lui dire :

« L’homme est celui qui apprend, l’école et les enseignants ne sont qu’un outil qui transmet la science. Ta disponibilité personnelle, ta bibliothèque et le temps nécessaire te permettront d’apprendre ce que tu veux. Ce qu’il te faut, c’est décider l’orientation et de l’effort. »[9]

Dans une réflexion très critique sur le système éducatif, al-Kawâkibî dénonce ce qu’il considère comme l’un des travers majeurs de l’être humain : la soumission. Il proteste contre l’apprentissage de l’obéissance qui produit des générations dociles et soumises envers les dominants, incapables d’une libre décision ou d’un libre choix. Les étudiants, depuis l’enfance, apprennent la politesse envers le dominant, « ils embrassent sa main ou son pied. Ils sont respectueux, même s’ils sont humiliés » (Al-Kawakibi, 1995 : 430).

Cette obéissance, ancrée dans les habitudes de l’individu dès l’enfance, représente une partie de la relation complexe avec le pouvoir ; une relation de peur réciproque entre le despote et le citoyen. Mais les raisons pour lesquelles chacun a peur de l’autre ne sont pas les mêmes. La peur du despote par rapport à son sujet est plus grave puisqu’elle émane « d’une connaissance, et l’autre émane d’une ignorance » (idem : 459). Le despote a peur d’une volonté de revanche, le sujet réprimé a peur d’une défaillance dans le statu quo. Le despote a peur de perdre sa vie et son pouvoir, « le réprimé a peur pour quelques miettes de pain et pour une demeure »[10]. L’ignorance est donc la plus grave des maladies qui laisse le chemin libre pour toutes les pratiques despotiques de la part du pouvoir politique et du pouvoir religieux.

La science représente l’ennemi le plus farouche du despote, puisqu’elle « est une lueur, et la tyrannie est une obscurité. Il est de la nature de la lumière de dissiper l’obscurité » (idem : 457). Cependant, peut-on parler de la science comme d’une globalité ? Toutes les sciences ont-elles le même impact sur l’agissement du despote ?

Pour al-Kawâkibî, la réponse est négative. Les sciences que le despote craint le plus sont celles qui

« développent les esprits, élargissent les cerveaux et font connaître à l’homme quels sont ses droits, à quel niveau ils sont violés, comment les revendiquer, comment les atteindre, et comment les conserver […] » (idem : 458).

Dans sa catégorisation des différents champs de la science, al-Kawâkibî s’appuie sur une logique politique, en établissant un lien entre la science d’un côté et le politique – et la politique – de l’autre. Le pouvoir politique se désintéresse du développement de certains champs scientifiques, estimant qu’ils ne représentent pas une menace pour sa domination. Ainsi, le despote ne craindrait pas « les sciences de la langue […] si derrière cette langue il n’y avait pas de la sagesse et du sens comme les écrits de Schiller et Montesquieu […] » (idem : 457). Il se peut même que le pouvoir politique les encourage dans l’espoir d’occuper la population, et notamment son élite, dans des domaines qui les éloignent du domaine de la politique. De même, le despote ne craint pas les sciences religieuses parce qu’elle servent à « occuper les admirateurs de la science » qui peuvent être par la suite « utilisés et corrompus par le despote […] » (idem : 458). Al-Kawâkibî considère aussi que les sciences appliquées, comme les mathématiques, ne représentent pas de dangers pour le despote puisque, selon lui, « les mathématiciens ont une courte vision » (idem).

Cependant, le pouvoir répressif craint sérieusement les sciences humaines qu’al-Kawâkibî appelle « les sciences de la vie ». Dès lors qu’il s’agit d’élargir la conscience, de la doter d’une connaissance meilleure, celle-ci devient revendicative, elle éclaire le chemin du citoyen vers ses droits. Alors, le despote s’alarme et essaye d’entraver le processus. Dans cette catégorie de sciences, al-Kawâkibî range la philosophie, qu’il appelle « la sagesse théorique », le droit international, qu’il appelle « les droits des nations », l’anthropologie, qu’il appelle « les caractéristiques de la société », la science politique, qu’il appelle « la politique civile » (idem), ainsi que l’histoire.

La science est donc perçue par al-Kawâkibî comme une arme extrêmement efficace dans la lutte contre le despotisme. C’est « un éclair de lumière de Dieu » (idem : 457) pour prescrire le bien et dénoncer le mal. Par rapport à ses sujets, le despote est comme « le mandataire puissant et traître qui usurpe les orphelins et leurs biens tant qu’ils restent faibles et mineurs » (idem). Dès lors, il n’est pas dans son intérêt qu’ils atteignent leur maturité. De même, le despote « évite que ses sujets ne soient éclairé par la science » (idem). L’expérience montre donc que tout renforcement de l’autoritarisme du gouvernant ainsi que son affaiblissement dépendent du degré de connaissance ou d’ignorance du gouverné.

Le despote appréhende la science pour ses conséquences, mais aussi en tant que telle, « car sa vigueur est plus forte que la sienne » (idem : 458). Un profond sentiment d’infériorité s’empare de lui chaque fois qu’il tombe sur une personne éclairée par la science. Pour éviter de se sentir ridicule, il s’appuie sur des scientifiques hypocrites. Dès lors, c’est entre le despotisme et la science une guerre perpétuelle et sans merci : les scientifiques cherchent à éclairer les consciences, tandis que le despote essaye d’éteindre leur lumière. Les deux se disputent la masse populaire. Cette « masse populaire », (‘Awâm) pour al-Kawâkibî, « ce sont ceux qui, outre l’ignorance, sont en proie à une peur qui fait d’eux des êtres résignés ; cependant, dès que la science les saisit, ils ont la parole, la parole qui les conduit à l’action » (idem).

L’espoir réside dans la jeunesse, et les jeunes doivent prendre leur sort en main car ils sont, pour al-Kawâkibî, les seuls capables de mener la réforme en étant à l’écoute d’une élite qui les guide sur le bon chemin. Ils savent que l’avenir de l’humanité se trouve dans la science, et que l’ignorance transforme la vie politique et sociale en souffrance. À cette jeunesse prometteuse s’oppose la vieille génération qui « se contente de sa paresse et de son humilité » (idem).

En guise de conclusion

Dans son analyse de la situation et sa tentative de comprendre la relation entre le despotisme et les différents éléments de la société arabo-musulmane, al-Kawâkibî élargit sa vision vers d’autres expériences dans le domaine de la sociologie politique. Il note que

« certains sociologues occidentaux considèrent que la religion influence négativement l’émancipation individuelle et sociale […] et certains autres disent que la religion et la raison sont antinomiques […].Ces appréciations sont exactes pour les religions qui ne respectent pas les limites de la logique, […] mais pas pour les religions construites sur la raison comme l’Islam » (Al-Kawakibi, 1995 : 507).

Dès lors, même s’il se montre très sévère avec l’interprétation faite de l’Islam et son usage, selon lui, erroné, il ne vise pas un rejet total. Loin de là. Il tente de définir les méthodes adéquates qui éviteront à sa société de retomber dans de mauvais travers. Sa réflexion relie en permanence le despotisme religieux et le despotisme politique. Cette démarche l’amène à produire une vision particulière de l’Islam qui « n’est pas la religion de la majorité des Musulmans actuellement, mais celle du Coran » (idem : 508). Un Islam où « chacun ayant le loisir de penser librement, puisse le comprendre sans être influencé par qui que ce soit » (idem). Sa critique du rôle des religieux les montre comme des manipulateurs que le pouvoir politique utilise pour diriger les croyants et les contraindre à admettre son autorité. L’Islam a besoin, constate al-Kawâkibî, d’un mouvement de rénovation qui nécessite, selon lui, l’ouverture de la porte de l’interprétation. L’interprétation, dans le cadre de l’effort jurisprudentiel, se ferait en s’appuyant sur le dialogue intellectuel au sein des institutions ; d’où l’importance du rôle joué par celles-ci dans le développement de la société.

Al-Kawâkibî affirme que l’intégrisme religieux est la principale raison de la décadence. Ce phénomène présente l’Islam sous un aspect violent et menaçant ; ce qui est à l’inverse de son message humaniste. Pour contrer cette image que certains donnent de l’Islam, il lance un appel à la vigilance afin que l’Islam et les Musulmans se protègent de l’obscurantisme qui ne peut, selon lui, les mener qu’aux pires résultats. Influencé par les idées constitutionnelles et libérales, al-Kawâkibî suggère le remède : l’instauration d’un État de droit, fondé sur des institutions démocratiques. La séparation entre la religion et l’État représente une base de sa pensée politique, ainsi que la séparation entre les pouvoirs au sein de l’État. C’est la condition primordiale, selon lui, pour éviter la transformation de l’action politique en despotisme et pour l’émancipation des droits de l’homme.

L’activité des réformistes turcs des années 1870, comme Nâmiq Kâmil, a beaucoup influencé l’action d’al-Kawâkibî. Leurs traductions presque complètes des œuvres de Montesquieu et de Rousseau lui ont fourni un intermédiaire essentiel vers la pensée française des Lumières et les principes constitutionnels et démocratiques de la Révolution. Il y reconnaît le rôle de l’Église, de son pouvoir sur les esprits et sa place dans les modèles occidentaux du despotisme. À leur tour, les idées d’al-Kawâkibî ont été largement réappropriées et transformées depuis sa mort jusqu’à aujourd’hui par une scène politique en manque de références et à la recherche d’une caution morale. Ainsi, les nationalistes syriens qui revendiquent la « grande Syrie » parlent de lui comme « le premier Syrien » (Dayé, 1988) à cause de l’intérêt qu’il portait sur Bilâd al-Châm et de son opposition à l’influence turque dans la région. Son hostilité au despotisme, y compris celui de l’argent, et ses revendications à caractère social l’ont par ailleurs rapproché du parti communiste syrien qui affiche le portrait d’al-Kawâkibî dans toutes ses réunions et congrès. Les nationalistes arabes, comme Khaldûn Sati’ al-Husarî (Al-Husari, 1966), revendiquent sa pensée et notamment son opposition à un Khalife autre qu’arabe, soulignant qu’il était l’un des pionniers du concept même de nationalisme arabe. Enfin, pour l’islamisme modéré, al-Kawâkibî représente le dernier réformateur et l’un des plus pur salafistes. Mohamad ‘Amâra a ainsi écrit un livre sur lui intitulé Le martyr de la liberté et le rénovateur de l’Islam (‘Amara, 1984).

La vie courte et mouvementée d’al-Kawâkibî, son choix de l’exil, relient son sort à celui de bien d’autres intellectuels, traqués par un pouvoir absolu, qui n’ont vu de salut que dans la fuite, comme « tous les prophètes, la majorité des scientifiques et des éclairés qui se sont dispersés dans le monde et qui sont décédés à l’étranger » (‘Amara, 1984 : 459). L’héritage d’al-Kawâkibî reste à l’ordre du jour du fait de son intérêt pour la démocratie et de sa critique du pouvoir absolu. Son objectif essentiel fut la réalisation d’un État moderne dans lequel les droits de l’homme seraient respectés, les pouvoirs séparés et la science privilégiée.

*** *** ***

Bibliographie

-          Al-Ghazzî K., 1955, Târikh Halab (Histoire d’Alep), Alep, Dâr al-Charq.

-          Al-Husarî K.S., 1966, Three reformers: A study in Modern Arab Political Thought, Beirut, Khayat’s edition.

-          Al-Kawâkibî, 1995, Œuvres complètes, Beyrouth, Centre des études de l’unité arabe, 579 pp.

-          Al-Kawakibi S., 2000, Al-sîra al-zâtîya li ‘Abd Al-Rahman al-Kawâkib, (Biographie d’al-Kawâkibî), Beyrouth, Dâr Bîssân.

-          ‘Amara M., 1984, ‘Abd al-Rahmân al-Kawâkibî, Shahîd al-hurriyya wa mujaddid al-islâm, Beyrouth, Dâr al-Wahda.

-          Dayé J., 1984, Sahafat al Kawakibi (la presse d’al-Kawakibi), Beyrouth, Dâr Fikr.

-          Dayé J., 1988, Al imâm al-Kawâkibî : Fasl al-dîn ‘an al-Dawla, Londres, Dâr Sûraqîa.

-          Dayé J., 2000, Sahafat al-Kawakibi, 2e partie (La presse d’al-Kawakibi), al-’Arab, 80 pp.

 

Annexe

Liste des periodiques contenant les principaux articles d’Al-Kawakibi

  1. Al-Mu’ayyad (le soutenu) d’‘Alî Yûsif publié au Caire. Le premier article d’Al-Kawâkibî est publié pendant qu’il est encore à Alep le 17 mars 1899. Il le signe du pseudonyme Halab. À partir du moment où il s’installe au Caire, ses publications se multiplieront dans ce même journal.
  2. Al-Manâr (le phare) de Rachîd Ridâ où al-Kawâkibî publie en respectant la volonté de Ridâ de ne pas critiquer nominativement le Sultan. Son dernier article dans al-Manâr est publié le 11 janvier 1905 trois ans après sa mort. Il présente une réflexion sur son voyage en Afrique, sur l’esclavagisme et la position de l’Islam par rapport à ce commerce inhumain. Dans ce même article, l’auteur parle d’un livre de lui qui traite de ce sujet et qui a disparu avec d’autres écrits.
  3. Al-Najâh (la réussite), édité à Beyrouth, dans lequel il publie sous un pseudonyme à partir de 1872 et pendant cinq ans.
  4. Al-Nahla (l’abeille), édité à Londres, dans lequel il publie deux articles le 1 avril 1879 sur la ville d’Alep.
  5. Al-Ahrâm (la pyramide), édité au Caire, où il publie le 12 juin 1879 un article satirique sans signature[11], dans lequel il critique les autorités ottomanes d’Alep.
  6. Al-Misbâh (la lampe), édité au Liban, où il publie le 24 mars 1883 un article suite à l’interdiction de son journal al-I‘tidâl. Il profite de la situation exceptionnelle de la presse dans la montagne libanaise, à la suite à la crise de 1880 qui a mené les autorités à octroyer à la presse locale des mesures plus clémentes que celles appliquées dans les autres régions.
  7. Lissân al-‘arab (la langue des arabes) où il publie le 28 août 1895 un article intitulé : « Ce que l’homme aime le plus c’est ce qu’il lui est interdit ! », et un deuxième le 4 septembre 1895.
  8. Al-Muqattam au Caire, où il publie deux fois sous le nom d’ « un Musulman aux idées libres ». Ces articles, publiés le 5 et le 7 août 1899, analysent l’idée d’une « ligue islamique » et suscitent un débat avec M. Rachîd Ridâ, le rédacteur de ce même journal.

* Pensionnaire de recherche à l’IFPO.

[1] Al-Chahbâ’, 28 avril 1877, Alep.

[2] Al-Chahbâ’, 28 avril 1877, Alep.

[3] Muhammad Rachîd Ridâ, al-Manâr, vol.8, 11 janvier 1905, p. 861.

[4] Al-Muqatam, numéro 3149, 7 août 1899, le Caire.

[5] Idem.

[6] Al-Muqatam, op. cit.

[7] Al-Muqattam, op. cit.

[8] Lettre conservée dans les archives privées de la famille.

[9] Idem.

[10] Idem.

[11] Dans ses manuscrits se trouvent des indices qui authentifient les écrits qui n’ont pas été signés.

 

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