L’analyse du Coran à la lumière
de la déconstruction de Derrida
La sourate
XXII (Al-Ḥajj) comme modèle ([1])
Mohamed Ali Abdel Jalil
Université d’Aix-Marseille
Dans le Discours sur les sciences et les arts,
Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) affirme que le langage
contrôlé est un instrument de dissimulation des passions
humaines. Comme Jean Starobinski (1920- ) a souligné, la
culture, à travers la médiation linguistique, construit
continuellement des voiles et des obstacles qui empêchent
l’intuition pure de sa propre intériorité et de celle des autres.
Le langage, comme il est évident aussi dans l’Émile ou De
l’éducation de Rousseau (1762), représente pleinement le pouvoir
déformant de la culture. Selon Rousseau, la parole cache les
passions originelles de l’homme qui l’avaient produite.[2]
Ainsi, une des fonctions du langage est de ne pas
transmettre un message, mais de le cacher, ce qui exige, pour
révéler le vouloir-dire du texte coranique, de lire entre les
lignes, de creuser dans le texte, de le déconstruire, d’éclairer
ses coins obscurs, de faire parler ses vides et ses lacunes.
Aussi est-il temps d’appliquer sur lui la Déconstruction de
Derrida.
Il semble que l’un des objectifs de l’exégèse
coranique est de compléter le texte (et ainsi font ses
traductions), de le raccommoder, de le rafistoler, de combler
ses vides et de résoudre ses incohérences et ses contradictions,
car la contradiction entre les versets coraniques, ou à
l’intérieur d’un même verset, pose un très grand problème de
compréhension aussi bien pour un simple lecteur que pour un
théologien et chercheur. Ce thème préoccupe énormément les
musulmans à tel point qu’il suffit de taper le mot
ÊäÇÞõÖ (tanāquḍ, incohérence,
contradiction) sur le moteur de recherche Google pour que ce
dernier vous propose comme un premier résultat :
« ÊäÇÞõÖ ÇáÞÑÂä »
(« tanāquḍ al-qurʾān », l’incohérence du Coran). La réfutation
des contradictions du Coran a fait couler beaucoup d’encre. À
titre d’exemple, le théologien égyptien Muḥammad ʿAmāra a
consacré un ouvrage intitulé
ÔÈåÇÊ Íæá ÇáÞÑÂä ÇáßÑíã
(Shubuhāt ḥawla al-qurʾān al-karīm [Des soupçons
autour du noble Coran], Éditions Dār Nahḍat Miṣr, 2009) pour
réfuter ces contradictions. Une gigantesque collection
d’ouvrages de 24 volumes intitulée
ãæÓæÚÉ
ÈíÇä ÇáÅÓáÇã. ÇáÑÏ Úáì ÇáÇÝÊÑÇÁÇÊ æÇáÔÈåÇÊ
(Mawsūʿat bayān al-ʾislām. Ar-radd ʿalā al-iftirāʾāt
wa ash-shubuhāt [l’Encyclopédie de l’explication de l’Islam. La
réfutation des diffamations et des soupçons], Éditions Dār
Nahḍat Miṣr, 2012) a été écrite par 200 théologiens pour réfuter
plus de 1200 shubha dont le plus important est les
contradictions dans le Coran.
Pour mieux comprendre ces contradictions et
connaître ce que cache le texte coranique, il est important de
le déconstruire.
« La
déconstruction n’est pas simplement une philosophie, ni un
ensemble de thèses, ni même la question de l’Être, au sens
heideggérien. D’une certaine manière, elle n’est rien. Elle ne
peut pas être une discipline ou une méthode. »[3]
Puisque, selon Jacques Derrida, la déconstruction
n’est pas une méthode et n’a ni règles ni procédures qui
pourraient servir à élaborer une méthodologie de la
déconstruction, j’ai proposé quelques repères pour analyser la
sourate 22 (Al-Ḥajj) à la lumière de l’approche déconstructrice
derridienne dans le but de mieux comprendre les contradictions,
les incohérences et la polysémie du texte coranique. Ces repères
sont :
Analyser les contradictions et les incohérences
du texte. À titre d’exemple, le verset 39 de la sourate Al-Ḥajj
("ÃõÐöäó
ááÐíä íÞÇÊáæä ÈÃäåã ÙõáöãæÇ"
[« Permission est donnée à ceux qui combattent pour avoir subi
l’iniquité »] [traduction de Jacques Berque]) est logiquement
incompatible avec le verset précédent 38
("Åäøó
Çááåó íõÏÇÝöÚõ Úä ÇáÐíä ÂãóäæÇ"
[« Dieu prend la défense de ceux qui croient »] [traduction de
Berque]). Pourquoi « Dieu » autorise-t-il aux croyants de
combattre pour se défendre si « Dieu » lui-même s’engage à les
défendre ?! Cela peut indiquer que chaque énoncé renvoie à une
situation sociopolitique complètement différente de l’autre et
répondait à un besoin sociologique spécifique. Ainsi, le verset
38 peut être mecquois et reflète la période de la faiblesse de
la communauté musulmane, alors que le verset suivant 39 peut
être médinois et reflète la période de la capacité des musulmans
à attaquer les autres et à conquérir.
Réinterroger les présupposés du texte pour ouvrir
de nouvelles perspectives, faire dire au texte tout à fait autre
chose que ce qu’il semblait dire, non pas d’une manière
aléatoire mais sur la base des critères dont : les règles de la
grammaire, l’usage de la langue à l’époque de la rédaction du
Coran et les exégèses hétérodoxes. Considérer le texte comme les
rêves qui « occultent ou trahissent plutôt qu’ils révèlent »[4],
le lire en quelque sorte à contre-jour, à contre-lumière. Par
exemple, le verset 5 de la sourate Al-Ḥajj[5]
ne parle pas explicitement de la réincarnation ; mais le fait
d’évoquer en même temps dans un même verset les étapes de la
création de l’Homme et le cycle de la vie (la renaissance
cyclique de la nature) pourrait montrer que ce verset fait une
forte allusion à la réincarnation, ce que soulignent les
exégèses alaouites nusayrites et druzes.
Repérer les coins négligés et analyser ce que le
texte ne dit pas (les blancs ou les vides), les lacunes. Ces
vides contribuent à augmenter et à orienter la polysémie. Par
exemple, dans la phrase impérative ("ÇÊøóÜÜÞõæÇ
ÑÈøóßã"
[« prémunissez-vous envers votre Seigneur »] [traduction de
Berque]) (XXII, 1), il y a un vide : on ne sait pas comment les
croyants doivent craindre leur Seigneur (qui ?). Pour les
courants orthodoxes, le commandement « ittaqū rabbakum » peut
signifier entre autres : ne faites pas de mal, ne croyez pas à
la Trinité, ne buvez pas d’alcool, faites les cinq prières et le
ramadan, etc. Par contre, ce même commandement peut signifier
chez les courants hétérodoxes et ésotériques (surtout chez les
alaouites nusayrites) : ne faites pas de mal, communiez entre
vous avec du vin[6],
croyez en la réincarnation, gardez les secrets de la confrérie,
etc.
De tels vides
peuvent indiquer que les détails ne sont pas importants pour les
auteurs d’un palimpseste[7]
et que le texte est bâti sur la base d’un syncrétisme religieux
et scripturaire que l’on a cherché à dissimuler sous une série
de lacunes et de répétitions.
Le pronom possessif -kum [votre] exprime la
possessivité et l’appartenance. Le verset voulait dire aux
musulmans qu’ils doivent respecter leur propre « Rabb ». Le mot
masculin rabb signifie : maître, chef, patron, possesseur,
seigneur. Le verset voulait donc implicitement dire aux croyants
qu’ils doivent obligatoirement respecter leurs propres
dirigeants (et par la suite l’image de Dieu imposée par leurs
chefs) et craindre leur punition. Cela veut dire aussi que le
respect d’un autre chef et d’une autre image de la divinité
n’est pas obligatoire.
Souligner les répétitions, les collages, les
copiés-collés[8],
les pléonasmes, les verbiages, les phrases insignifiantes et
prolixes et les comparaisons vagues qui peuvent montrer que le
sens n’est pas prioritaire pour les auteurs ou les compilateurs
du Coran. Le texte coranique utilise des expressions tellement
génériques qu’elles ne disent rien. Il semble que l’image dans
le verset XXII, 31 ("æãóä
íõÔúÑößú ÈÇááåö ÝßÃäøóãÇ ÎóÑøó ãöäó ÇáÓãÇÁ ÝÊóÎúØóÝõåõ ÇáØøóíÑõ
Ãæ Êóåæöí Èå ÇáÑøöíÍõ Ýí ãßÇäò ÓÍíÞ"
[« qui associe à Dieu, c’est comme s’il
dégringolait du ciel, et qu’alors un oiseau le happe ou que le
vent l’abîme en un lieu perdu »] [traduction de Berque]) n’est
qu’une compilation de mots pour faire peur au croyant. La phrase
suivante du verset 36 demande aux croyants de manger de leurs
animaux une fois abattus
("ÝÅÐÇ
æÌÈóÊú ÌäæÈõåÇ ÝßõÜáõæÇ ãäåÇ æÃØÚöãæÇ ÇáÞÇäÚó
æÇáãõÜÜÜÚúÜÜÊóÜÜÜÜÑøó. ßÐáßó ÓÎøóÑäÇåÇ áßã áÚáøóßã ÊÔßÑæä"
[« une fois affalées sur le côté, mangez-en, donnez-en à manger
au suppliant et au quémandeur. – Ainsi mettons-Nous (ces bêtes)
à votre disposition, escomptant que vous en aurez gratitude. »]
[traduction de Berque]). Une telle phrase prolixe semble comme
un cri d’identité. Autre exemple plus clair, c’est le verset
XXIV [An-Nūr], 61 qui semble comme une sorte de verbiage[9],
comme le souligne à juste titre l’intellectuel libéral, le
traducteur et le théologien irakien Ahmed Al-Gubbanchi[10].
Changer l’ordre actuel de certains versets
équivoques ou de certains mots à l’intérieur des versets pour
avoir une certaine logique et pour mieux comprendre le sens.
L’anastrophe [at-taqdīm wa at-taʾkhīr] et le désordre dans
certains versets peuvent perdre le sens ou obliger le lecteur à
forcer le texte pour inventer du sens. Exemple : Il semble que
cette phrase du verset 39 de la sourate Al-Ḥajj ("ÃõÐöäó
ááÐíä íõÞÇÊáæä ÈÃäåã ÙõáöãõæÇ"
[« Permission est donnée à ceux qui combattent pour avoir subi
l’iniquité »]) est dans un désordre, et il vaut mieux,
semble-t-il, mettre chacun des deux verbes à la place de l’autre
pour que la phrase soit logique et compatible avec ses
interprétations ; et l’ordre normal de la phrase doit être ainsi :
"ÃõÐöäó
ááÐíä ÙõáöãæÇ ÈÃäú íÞÇÊöáæÇ"
[« Permission est donnée à ceux qui ont subi de
l’iniquité pour combattre »]. Un autre exemple sur le désordre
qui crée une contradiction ou une ambiguïté dans le texte
coranique (ce qui oblige les exégètes à inventer une autre
signification pour raccommoder le verset) est les versets 58 et
59 d’Al-Ḥajj :
"(58) æÇáÐíä åÇÌóÑæÇ Ýí ÓÈíá Çááå Ëã ÞõÊöáæÇ Ãæ
ãÇÊæÇ áóíóÑÒõÞóäøóåã Çááåõ ÑÒÞÇð ÍóÓäÇð æÅäøó Çááåó áóåõæó ÎíÑõ
ÇáÑÇÒÞöíä. (59) [ø] áóÜÜÜíõÏúÎöáóÜÜÜäøóåã ãõÏúÎóáÇð íÑÖæäå".
(ÇáÑøöÒÞ ÇáÍóÓóä:
åæ ãÇ íÕá Åáì ÕÇÍÈå ãä ÛöÐÇÁ ÈáÇ ßÏø Ýí ØáÈå¡ ßãÇ Ýí ÇáÂíÉ:
"æóãöäú ËóãóÑÇÊö ÇáäøóÎíáö æóÇáÃÚäÇÈö ÊóÜÜÜÊøóÎöÐæä ãäåõ ÓóßóÑÇð
æÑöÒÞÇð ÍóÓóäÇð" [ÇáäÍá¡ 67])
« (58) Quant à ceux qui ont fait exode sur le
chemin de Dieu, et puis encore y furent tués ou sont morts (de
mort naturelle), Dieu assurément leur attribuera splendide
attribution [litt. : leur donnera des nourritures sans aucun
effort]. – Il est par excellence Celui qui attribue [litt. :
donne de la nourriture]. (59) [ø] Il les fera entrer l’entrée de
contentement » [traduction de Berque].
Comment Dieu donnera un rizq ḥasan [vivres,
nourritures, aliments qu’on peut avoir sans peine] aux émigrés
qui sont morts ?! Il semble que la place de la phrase (Ëã
ÞõÊöáæÇ Ãæ ãÇÊæÇ) doit être au début du verset suivant (
verset 59), comme suit :
"(58) æÇáÐíä åÇÌóÑæÇ Ýí ÓÈíá Çááå áóíóÑÒõÞóäøóåã
Çááåõ ÑÒÞÇð ÍóÓäÇð æÅäøó Çááåó áóåõæó ÎíÑõ ÇáÑÇÒÞöíä. (59) Ëã
[ÅÐÇ] ÞõÊöáæÇ Ãæ ãÇÊæÇ áóíõÏúÎöáóäøóåã ãõÏúÎóáÇð íÑÖæäå".
Mettre en lumière la nécessité de l’assonance au
détriment du sens : Contrairement à ce que disent les
grammairiens sur le rôle de ʾinna comme particule d’affirmation,
le Coran l’utilise souvent pour des raisons purement
stylistiques. Il utilise une même phrase tantôt avec ʾinna
tantôt avec kāna, selon le besoin non sémantique mais
assonantique et prosodique. Je donne l’exemple suivant : « ʾInna
dhālika ʿala-llāhi yasīr » [« [ø] Et c’est pour Dieu bien aisé »
[traduction de Berque]] (XXII, 70) et « kāna dhālika ʿala-llāhi
yasīrā » (IV [An-Nisāʾ], 169). La clausule du verset 17
d’Al-Ḥajj est un autre exemple qui consolide cette idée : « ʾinna
llāha ʿalā kulli shayʾin shahīd » [« [ø] Dieu de toute chose est
Témoin » [traduction de Berque]]. Comparons-la avec la même
phrase d’un autre verset à assonance accusatif :
"Åäøó Çááåó Úáì ßõáøö ÔíÁò ÔåöíÏñ." (ÇáÓæÑÉ 22
ÇáÍÌ¡ 17)
"Åäøó Çááåó ßÇäó Úáì ßõáøö ÔíÁò ÔåíÏÇð".
(ÇáÓæÑÉ 33 ÇáÃÍÒÇÈ¡ 55)
Dans le second verset, le verbe kāna (v. XXXIII,
55) que les exégètes considèrent comme marquant l’éternité (un
sens qui se perd à la traduction) n’indique pas le temps en
réalité. Il a pour rôle juste d’obtenir une assonance à cas
accusatif pour que la fin (l’assonance) de ce verset soit
compatible avec l’ensemble de la sourate (ÎÈíÑðÇ
[v. 2],
ÚáíãÜÜÜÇð
[v. 54],
ÔåíÏÇð
[v. 55],
ÊÓáíãÜÜÜÇð
[v. 56],
ãõåíäÜÜÜðÇ
[v. 57], [v. 73], etc.). Ainsi, ʾinna et kāna ont
un rôle plus stylistique que sémantique. L’assonance a forcé
l’auteur (fictif) ou le compilateur du Coran à utiliser kāna
pour avoir un effet musical sur les lecteurs.
Le mot nakīr
[châtiment] dans le verset 44 d’Al-Ḥajj voulait dire : nakīrī
[Mon châtiment]. Pourquoi le pronom possessif -ī [mon/ma/mes] du
mot nakīrī a été supprimé ? Certains musulmans en donnent une
signification, c’est pour indiquer la perpétuité[11].
Mais la question qui se pose est pourquoi ce pronom suffixal
n’est-il généralement supprimé que du substantif qui vient à la
fin du verset ? La seule raison d’élider le déterminant
possessif du locuteur (yāʾ al-mutakallim) dans le Coran est,
semble-t-il, le respect de l’assonance du verset.
Dans le Coran, le mot nakīrī est toujours utilisé
sans -ī dans la clausule « fa-kayfa kāna nakīr » [« comment fut
donc dur Mon châtiment »], clausule qui termine les versets :
XXII [Al-Ḥajj], 44 ; XXXIV [Sabaʾ], 45 ; XXXV [Fāṭir], 26 ; et
LXVII [Al-Mulk], 18.
Dans 11 occurrences dans le Coran, le pronom
possessif singulier de l’énonciateur (-ī) a été supprimé des
substantifs suivants qui viennent à la fin des versets.
matāb[ī] (mon repentir) (XIII, 30) ;
maʾāb[ī] (mon retour) (XIII, 36) ;
duʿāʾ[ī] (ma prière) (XIV, 40) (par contre, le
pronom possessif -ī apparaît dans ce même mot (duʿāʾī) lorsque
ce dernier vient au milieu du verset (LXXI, 6)) ;
dīn[ī] (ma religion) (CIX, 6) (alors que ce même
mot apparaît au milieu du verset X, 104 avec le pronom -ī ainsi
dīnī)[12] ;
ʿibād[ī] (mes
serviteurs) (XXXIX, 17)[13] (tandis
que ce même mot apparaît 17 fois toujours au milieu des versets
avec le pronom -ī (ʿibādī)) ;
ʿadhāb[ī] (mon tourment) (XXXVIII, 8). Cependant,
le -ī apparaît toujours dans ce même mot quand ce dernier vient
au milieu (ainsi : ʿadhābī), dans les versets : VII, 156 ; XIV,
7 ; XV, 50 ; LIV, 16, 18, 21, 30, 37, 39. Remarquons ici dans
les six derniers versets que dans le mot médianʿadhābī le -ī est
fixé, mais il est supprimé du mot suivant final (nudhur) qui
termine les versets (« fa-kayfa kāna ʿadhābī wa nudhur[ī] » [« combien
furent donc durs Mon châtiment et Mes avertissements »].
ʿiqāb[ī] (ma punition) (XIII, 32 ; XXXVIII, 14 ;
XL, 5) ;
nudhur[ī] (mes avertissements) (LIV, 16, 18, 21,
30, 37, 39) ;
nadhīr[ī] (mon avertissement) (LXVII, 17) ;
nakīr[ī] (mon châtiment) (XXII, 44 ; XXXIV, 45 ;
XXXV, 26 et LXVII, 18) ;
waʿīd[ī] (ma menace) (XIV, 14 ; L, 14, 45).
Analyser les éventuelles « erreurs »
d’orthographe ainsi que l’énallage (ÇáÇáÊÝÇÊ)
(en tant que défaut stylistique) que les grammairiens (comme Abū
ʿUbayda Maʿmar ibn Al-Muthannā [728-824]) ont classifiée sous la
rubrique du majāz al-qurʾān [les licences ou les exceptions du
Coran] et dont la répétition rend le style faible et souvent
ambigu. À propos des éventuelles « erreurs » d’orthographe et à
titre d’exemple, le Coran utilise maintes fois l’adjectif ʿaẓīm
[grand/terrible] pour décrire le jour [yawm] dernier dans les
versets XIX [Maryam], 37 ; XXVI [Ash-Shuʿarāʾ], 135 et 156 ; et
XXXIX [Az-Zumar], 13. Seul le verset 55 de la sourate Al-Ḥajj
utilise le mot ʿaqīm [stérile] (au lieu de ʿaẓīm) pour décrire
le jour dernier. S’agit-il donc d’une erreur d’orthographe ou
d’une omission ? D’autant plus que le rasm[14]
du Coran sans points diacritiques ne distinguait entre ʿaẓīm (ÚØìã)
et ʿaqīm (Úãìã)
que par un petit bâton sur la consonne ẓ [la lettre ẓāʾ] de ʿaẓīm.[15]
Il est à souligner que seulement trois traducteurs (M.
Hamidullah, Z. Abdelaziz et S. Aldeeb) ont rendu littéralement
le mot ʿaqīm par son équivalent français : stérile, alors que
les autres traducteurs ont rendu ce même mot par un mot du sens
proche du mot ʿaẓīm (très rigoureusement, terrible, terrifiant)
comme s’ils ont corrigé l’erreur en traduisant le mot ʿaẓīm et
non pas ʿaqīm.
Comme exemple sur l’énallage (le changement du
pronom ou du temps du verbe) dont regorge le Coran et qu’Abū ʿUbayda
considère comme majāz (exception)[16],
je cite le verset 5 de la sourate Al-Ḥajj. Au début du verset,
la parole est adressée à un groupe (Vous, an-nās) (la deuxième
personne du pluriel) et porte sur la première preuve d’al-baʿth
[la résurrection] (i.e. la preuve de la naissance de l’être
humain), alors qu’à la fin du verset, la parole est adressée à
la deuxième personne du singulier (toi) et porte sur une seconde
preuve (i.e. la renaissance cyclique de la nature).
Il est à
souligner que le traducteur du Coran en français et en anglais
Sami Aldeeb (juriste suisse d’origine palestinienne) travaille
actuellement sur les « erreurs » du texte coranique et il a
publié jusqu’à maintenant environ 200 erreurs linguistiques et
stylistiques.[17]
Cependant, il est important d’aborder ces
anomalies et exceptions du Coran non pas en tant qu’« erreurs »
ou « défauts », mais en tant que « révélatrices » des subtilités
et des secrets du texte.
Repérer les expressions et les mots rares (gharīb)
(les hapax legomenon) (dont on ne connaît qu’une seule occurrence,
comme « abb » [pâturage ?] [sourate ʿAbasa [Renfrogné] LXXX, 31]
et « ghislīn » [pus ?] [sourate Al-Ḥāqqa [l’Inéluctable] LXIX,
36]) et voir s’ils n’ont pas été utilisés à l’époque de la
rédaction du Coran, ce qui signifierait que c’est le Coran qui
les a empruntés, ou inventés, ou les a mis en utilisation pour
répondre à un besoin de traduction. Ces hapax peuvent indiquer,
entre autres, que le Coran arabe est un texte traduit en sens
« descendant » (traduction aval), d’une (des) langue(s)
dominante(s) vers une langue dominée ou un idiome vernaculaire
(en l’occurrence l’arabe). La traduction en sens « descendant »
est une traduction sourcière qui est plus fidèle au texte-source
dont il reste des traces (par opposition à la traduction en sens
« ascendant », vers l’amont, la traduction cibliste, qui est une
traduction depuis une culture dominée vers une culture dominante,
où il n’y a pas de trace du texte de départ).[18]
Une lecture déconstructrice des « erreurs » du
texte coranique peut indiquer plusieurs choses :
Lors de l’écriture du Coran, le plus important
pour les scribes était de bâtir, à la base d’un syncrétisme
religieux et scripturaire, un texte sacré qui puisse servir un
objectif identitaire précis ("ÞõÑÂäÇð
ÚÑÈíÇð"
[« un Coran arabe »] [sourate XII [Yousuf], 2] [traduction
de Sami Aldeeb]). Ainsi, les détails du contenu du texte
n’étaient pas du tout importants. Selon un hadith du Prophète (Musnad
Ahmad, n° 16021), tout ce qu’ont dit dans le Coran est juste
tant que l’on ne commet pas de contresens ("íÇ
ÚõãóÑõ¡ Åäøó ÇáÞÑÂäó ßõáøóåõ ÕóæÇÈñ ãÇ áã íõÌúÚóÜÜÜáú ÚóÐÇÈñ
ãóÛÝöÑÉð Ãæ ãóÛúÝöÑÉñ ÚóÐÇÈÇð").[19]
L’objectif des auteurs du Coran était centré sur
l’assonance (« sajʿ », prose rimée) à la fin des versets (fāṣila
[séparante, coupe, césure, virgule]) pour avoir un appui
rythmique qui ne coïncide pas toujours avec la fin de la phrase,
afin d’utiliser le Coran (dérivé de qeryana [lectionnaire],
selon Christoph Luxenberg) comme un texte psalmodié.
Certaines « erreurs » peuvent souligner
l’insuffisance des moyens techniques et intellectuels à l’époque
de la rédaction du Coran. L’écriture d’un livre sans aucune
erreur était un travail presque impossible en Arabie au Moyen
Âge. En plus, les règles de l’orthographe n’étaient pas encore
normalisées, ni assez évoluées, comme Ibn Khaldoun (1332-1406) a
souligné ("ÝßÇäó
ÇáÎØøõ
ÇáÚÑÈíøõ áÃæá ÇáÅÓáÇã ÛíúÑó ÈÇáÛò Åáì ÇáÛÇíÉ ãä
ÇáÅÍßÇã æÇáÅÊÞÇä æÇáÇÌÇÏÉ" [ÊÇÑíÎ ÇÈä ÎáÏæä¡ Ì1¡ Õ 419]).
Le fait que les scribes ignoraient beaucoup de contextes du
Coran et les langues des textes-sources augmente les « erreurs ».
Si « l’erreur » (comme celle de « íæã
ÚÞíã »
[« jour stérile »]) est vraiment voulue, elle indique
probablement que la phrase est traduite en arabe à partir d’une
autre langue, car cette utilisation n’était pas connue en arabe.
Le fait que les auteurs du Coran utilisent 24
fois le mot féminin « ÚÇÞÈÉ »
(enfant, conséquence, suite, fin, punition) en tant que masculin
peut se justifier par le fait qu’ils voulaient garder le genre
grammatical du mot d’origine (peut-être le mot masculin
עקב
[éqèv] en hébreu) pour donner une autre dimension
sémantique au mot féminin arabe.
Parfois les auteurs du Coran modifiaient la
traduction arabe pour servir l’idéologie du conflit. Par exemple,
pour dénigrer les opposants juifs, les auteurs du Coran ont
modifié la traduction arabe du verset 27 du Deutéronome 5
("ÊóÞóÏøóãú
ÃóäÊó æÇÓãóÚú ßõáøó ãÇ íóÞæáõå ÇáÑøóÈ ÅöáåõäÇ¡ æÃóäÊó ßóáøöãúäÇ
Èößõáøö ãÇ íõßóáøöãõßó Èöå ÇáÑøóÈøõ ÅöáåõäÇ¡ ÝäóÓãÚ æäóÚãá
ושמענו ועשינו"
[« Approche, toi, et écoute tout ce que dira l’Éternel, notre
Dieu ; tu nous rapporteras toi-même tout ce que te dira
l’Éternel, notre Dieu ; nous l’écouterons, et nous le ferons. »])
pour devenir ainsi dans le verset 93 de la sourate II [Al-Baqara]
("æÅÐú
ÃÎóÐúäÇ
ãíËÇÞóßã æÑóÝóÚúäÇ ÝæÞóßã ÇáØøõæÑó: "ÎõÐæÇ ãÇ
ÂÊíäÇßã ÈÞæøóÉò æÇÓãóÚæÇ!" ÞÇáæÇ: "ÓóãöÚúäÇ æÚóÕóíäÇ"."
« En ce temps-là, nous avons pris votre
engagement et élevé au-dessus de vous le Mont [Sinaï] : « Prenez
avec force ce que nous vous avons donné, et écoutez ! » Ils
dirent : « Nous avons écouté et désobéi. » » [traduction Sami
Aldeeb]]).
Le fait que nous n’avons pas d’œuvre critique
faite par les adversaires de Mahomet pour « les erreurs »
linguistiques et stylistique du Coran ne signifie pas que le
Coran est exempt d’erreurs, mais il nous montre l’étendue de la
violence dans l’imposition du texte coranique. L’histoire nous
rapporte que le Prophète n’était pas du tout tolérant avec ceux
qui dénigraient le Coran (par exemple, il a insisté sur la
liquidation d’An-Naḍr ibn Al-Ḥārith).
Certaines « erreurs » ont été utilisées par des
théologiens pour souligner le dogme de l’inimitabilité (iʿjāz)
ou de l’éloquence du Coran ou pour servir un intérêt
sociopolitique. La suppression de l’information de « inna » dans
le verset 25 de la sourate Al-Ḥajj
("Åäøó
ÇáÐíä ßóÝÑæÇ æíóÕõÏøõæä Úä ÓÈíáö Çááåö æÇáãÓÌÏ ÇáÍÑÇãö ÇáÐí
ÌÚáäÇå ááäÇÓö ÓæÇÁ ÇáÚÇßÝ Ýíå æÇáÈÇÏö [ø] æãä íõÑöÏú Ýíå ÈÅáÍÇÏò
ÈÙáãò äõÐöÞúå ãä ÚÐÇÈò Ãáíãò."
[« Les dénégateurs, ceux qui dressent des obstacles sur le
chemin de Dieu, et de l’Oratoire consacré que Nous avons
institué pour les hommes, à égalité pour le résidant et
l’itinérant [ø]… et quiconque aurait volonté d’injustice et de
déviation, Nous lui ferions goûter d’un châtiment douloureux. »]
[traduction de Berque]) a été considérée par Sayyid Quṭub comme
un style éloquent pour donner l’idée que le châtiment est
évident. L’« erreur » de « íæã
ÚÞíã »
a été utilisée : (1)-pour augmenter la peur des croyants du
Jugement dernier et par la suite pour les faire obéir au pouvoir,
au sultan considéré comme « l’ombre de Dieu sur terre », ou
(2)-pour semer la terreur chez les adversaires en leur rappelant
la bataille de Badr, la première bataille victorieuse des
musulmans contre leur ennemi.
Les « erreurs » du Coran peuvent indiquer que les
musulmans considèrent comme sacré non seulement le sens (qui
change) mais aussi l’orthographe (le rasm) du texte (qui est
plus stable), comme le souligne Ibn Khaldoun :
"æÇäÙõÜÑú ãÇ æÞóÚó [...] Ýí ÑÓúãöåöãõ ÇáãõÕúÍÝó
ÍíËõ ÑÓóãóå ÇáÕÍÇÈÉõ ÈÎØæØåã æßÇäÊ ÛíÑó ãÓÊÍßöãÉò Ýí ÇáÅÌÇÏÉ
ÝÎÇáóÝó ÇáßËíÑõ ãä ÑÓæãåã ãÇ ÇÞÊÖóÊúå ÃÞúíöÓÉõ ÑÓæãö ÕäÇÚÉö ÇáÎØ
ÚäÏ ÃåáåÇ. Ëã ÇÞÜÊÜÝì ÇáÊÇÈÚæä ãöä ÇáÓáÝ ÑÓúãóåã ÝíåÇ ÊÈÑøõßÇð
ÈãÇ ÑÓóãóå ÃÕÍÇÈõ ÇáÑÓæá [...]. æáÇ ÊóÜÜáúÜÜÊóÜÜÜÝöÜÜÜÊóÜÜäøó Ýí
Ðáß Åáì ãÇ íÒÚãõå ÈÚÖõ ÇáãÛÝøóÜÜÜÜáíä ãöä Ãäåã ßÇäæÇ ãÍßóãíä
áÕäÇÚÉ ÇáÎØ æÃäøó ãÇ íõÜÜÊóÜÜÎíøóÜÜáõ ãä ãÎÇáÝÉ ÎØæØåã áÃÕæá
ÇáÑÓã áíÓ ßãÇ íõÜÜÊÎíøóÜÜá Èá áßáøöåÇ æÌåñ. íÞæáæä Ýí ãöËúÜÜáö
ÒíÇÏÉ ÇáÃáÝ Ýí "áóÃóÇúÐÈóÜÜÍóÜÜäøóÜÜåõ" [ÓæÑÉ Çáäãá¡ 21] Åäå
ÊäÈíåñ Úáì Ãäøó ÇáÐÈÍ áã íóÞÚú¡ æÝí ÒíÇÏÉ ÇáíÇÁ Ýí
"ÈöÃóíÜÜÜÜÜíúÜÜÜÏò" [ÇáÐÇÑíÇÊ¡ 47] Åäå ÊäÈíåñ Úáì ßãÇá ÇáÞÏÑÉ
ÇáÑÈÇäíÉ¡ æÃãËÇá Ðáß ããÇ áÇ ÃÕáó áå ÅáÇ ÇáÊÍßøõã ÇáãÍÖ. æãÇ
Íãóáóåã Úáì Ðáß ÅáøóÇ ÇÚÊÞÇÏõåã Ãäøó Ýí Ðáß ÊäÒíåÇð ááÕÍÇÈÉ Úä
Êæåøõãö ÇáäÞÕö Ýí ÞáøóÉ ÅÌÇÏÉ ÇáÎØ. æÍÓöÈæÇ Ãäøó ÇáÎØøó ßãÇáñ
ÝäÒøóåæåã Úä äÞÕöå æäÓÈæÇ Åáíåã ÇáßãÇáó ÈÅÌÇÏÊå æØáÈæÇ ÊÚáíáó ãÇ
ÎÇáÝó ÇáÅÌÇÏÉó ãöä ÑÓúãöå¡ æÐáß áíÓ ÈÕÍíÍ." (ÊÇÑíÎ ÇÈä ÎáÏæä¡
ÇáÌÒÁ ÇáÃæá¡ Õ 419)
Concernant les « défauts » du passage d’un pronom
à un autre dont regorge le Coran et que les théologiens et
grammairiens classifient dans la figure de style appelée : l’« iltifāt »
(ÇáÇáÊÝÇÊ, énallage)[20],
ils peuvent indiquer : (1)-que le texte a été réuni de plusieurs
contextes différents, ou (2)-que les auteurs du Coran ne
connaissaient pas les référents des pronoms dans les textes-sources.
Par exemple, on ne sait pas exactement à qui renvoie le pronom
de la première personne du singulier dans le Livre de Psaumes :
David, Dieu, le narrateur, l’auteur ?
Certaines « erreurs » peuvent montrer que les
scribes ne connaissaient ni les contextes ni les langues des
textes qui étaient à l’origine du Coran.
Si l’« erreur » est voulue, il est probable que
les auteurs voulaient faire perdre au lecteur le fil conducteur
du texte pour cacher une idée en contradiction avec leur
croyance. Ils ont ainsi dispersé les versets qui peuvent faire
allusion à la réincarnation. À titre d’exemple, voici un
contexte plus cohérent qui puisse souligner la réincarnation :
﴿"[...] æáóÆöä ÞõÜÜáúÊó: «Åäøóßã ãóÈÚæËæäó ãöä
ÈóÚúÏö ÇáãæÊö» áóíÞõæáóÜÜÜäøó ÇáÐíäó ßóÝóÑæÇ Åäú åÐÇ ÅáÇøó
ÓöÍúÑñ ãõÈíä." [åæÏ¡ 7] "íÇ ÃíøõåÇ ÇáäÇÓõ Åäú ßõäÊõã Ýí ÑóíÈò
ãöäó ÇáÈóÚËö ÝÅäøóÇ ÎóáÞúäÇßã ãä ÊõÑÇÈò Ëõãøó ãä äõØÝÉò Ëõãøó ãä
ÚóáÞÉò Ëõãøó ãä ãõÖúÛÉò ãõÎóáøóÜÜÜÞÉò æÛóíúÑö ãõÎóáøóÜÜÜÞÉò
áöÜäõÜÜÜÈóÜÜÜÜíøöäó áßã æäõÜÜÜÞöÑøõ Ýí ÇáÃÑÍÇãö ãÇ äóÔÇÁõ Åáì
ÃÌóáò ãõÓóãøìð Ëõãøó äõÎúÑöÌõßã ØöÝáÇð" [ÇáÍÌ¡ 5] – "ÝåÐÇ [åæ]
íæãõ ÇáÈÚËö æáßäóøßã [ßõäÊõã] áÇ ÊóÚáóãæä." [ÇáÑæã¡ 65] - "Ëãøó
áöÜÊóÜÜÈúÜÜÜáõÛæÇ ÃóÔõÏøóßõã æãöäßã ãóäú íõÜÜÊóÜÜæóÝøóì æãöäßõã
ãóäú íõÜÜÜÑóÏøõ Åáì ÃóÑÐóáö ÇáÚõãõÑö áößóíáÇ íóÚúáóãó ãöä ÈóÚúÏö
Úöáúãò ÔíÆÇð." [ÇáÍÌ¡ 5] "æÇáãæÊì íóÈÚóËõÜåãõ Çááåõ Ëõãóø Åáíåö
íõÑúÌóÚæä." [ÇáÃäÚÇã¡ 36] "ßÐáß" [ÇáÔÚÑÇÁ¡ 59 Ãæ ÇáßåÝ¡ 91 Ãæ
ÇáÏÎÇä¡ 28 æ54] "íóÎúÜÜáõÜÜÜÞõÜÜßã Ýí ÈõØæäö ÃõãøóåÇÊößõã
ÎóÜÜÜáúÞÇð ãöä ÈóÚúÏö ÎóÜÜÜáúÞò Ýí ÙõáõãÇÊò ËóáÇËò Ðáößõãõ Çááåõ
ÑóÈøõßõã áå Çáãõáúßõ áÇ Åáåó ÅáøóÇ åõæó ÝÃäøóì ÊõÕúÑóÝõæä¿" [ßíÝ
ÊóÖöÜáøõæä¿] [ÇáÒøõãóÑ¡ 6] "æåæ ÇáÐí ÃÍíÇßã Ëãøó íõãöíÊõÜÜßõã
Ëãøó íõÍúÜíöÜÜíßõã. Åäøó ÇáÅäÓÇäó áóßóÝõæÑ." [ÇáÍÌ¡ 66] "ßíúÝó
ÊóßúÝõÑæäó ÈöÇááåö æßõäÊõã ÃãæÇÊÇð ÝÃÍíÇßõã Ëãøó íõãöÜÜíÊõÜÜßã
Ëãøó íõÍúÜÜíöíßõã Ëãøó Åáíåö ÊõÑúÌóÚæä¿" [ÇáÈÞÑÉ¡ 28] "Ëãøó
ÈóÚóÜÜÜËúÜÜÜäÜÜÇßõã [íÈÚËßã] ãöä ÈóÚúÏö ãæÊößõã áÚáøóßã
ÊóÔßõÑæä." [ÇáÈÞÑÉ¡ 56] "íÇ ÃíøõåÇ ÇáÅäÓÇäõ ãÇ ÛóÑøóßó ÈöÑóÈøößó
ÇáßÑíãö ÇáÐí ÎóáóÜÜÜÞóÜÜÜßó ÝóÓóÜÜæøóÇßó ÝóÚóÜÜÏóáóÜÜßó¿ Ýí Ãíøö
ÕæÑÉò ãÇ ÔÇÁó ÑóßøóÈóÜÜßó." [ÇáÇäÝØÇÑ¡ 6¡ 7¡ 8] "Ãáóãú ÊóÑó Ãäøó
Çááåó ÃóäÒóáó [íõäÒöáõ] ãöäó ÇáÓøóãÇÁ ãÇÁð ÝóÜÜÊõÜÜÕúÈöÍõ ÇáÃÑÖõ
ãõÎúÖóÜÜÑøóÉð Åäøó Çááåó áØíÝñ ÎÈíÑ." [ÇáÍÌ¡ 63] "æÊóÑóì ÇáÃÑÖó
åÇãöÏÉð ÝÅÐÇ ÃóäÒóáúäÇ [ÃóäÒóáó] ÚáíåÇ ÇáãÇÁó ÇåÊóÜÜÜÒøóÊú
æÑóÈóÊú æÃóäÈóÜÜÊóÜÜÊú ãöä ßõáøö ÒóæúÌò ÈóåíÌ." [ÇáÍÌ¡ 5]
"íõÎúÑöÌõ ÇáÍóíøó ãöäó ÇáãíøöÊö æíõÎúÑöÌõ ÇáãíøöÊó ãöäó ÇáÍóíøö
æíõÍúíí ÇáÃÑÖó ÈóÚúÏó ãæÊöåÇ æßÐáößó ÊõÎúÑóÌæä." [ÇáÑæã¡ 19]
"ãöäúåÇ ÎóÜÜáóÜÜÜÞúÜÜÜäÇßã [ÎóÜáóÜÜÞóÜÜßã] æÝíåÇ äõÚíÏõßã
[íõÚíÏßã] æãäúåÇ äõÎúÑöÌõßõã [íõÎÑöÌõßã] ÊÇÑÉð ÃõÎÑì." [Øå¡ 55]
"æÇááåõ [ÝÇááåõ] ÃóäÈóÊóßõã ãöäó ÇáÃÑÖö äóÈÇÊðÇ¡ Ëõãøó íõÚíÏõßã
ÝíåÇ æíõÎúÑöÌõßã ÅÎÑÇÌÇð" [äæÍ¡ 17 æ18] "Ðáßó ÈÃäøó Çááåó åæ
ÇáÍóÞøõ æÃäåõ íõÍúíí ÇáãæÊì æÃäåõ Úáì ßõáøö ÔíÁò ÞÏíÑ." [ÇáÍÌ¡
6] "æÃäøó ÇáÓÇÚÉó ÂÊíÉñ áÇ ÑóíÈó ÝíåÇ æÃäøó Çááåó íóÈÚËõ ãóä Ýí
ÇáÞõÈæÑ." [ÇáÍÌ¡ 7] "ÞÇáæÇ: ÑóÈøóäÇ ÃóãóÜÜÜÊøóÜÜÜÜäÇ
ÇËúÜÜÜäóÜÜÜÊóÜÜÜíúäö æÃÍúÜÜíóÜÜÜíúÜÜÊóÜÜÜäÇ
ÇËúÜÜÜäóÜÜÜÜÊóÜÜÜÜíúäö ÝÇÚÜÜÊóÜÜÜÑÝúäÇ ÈöÐõäæÈöäÇ Ýåáú Åáì
ÎõÑõæÌò ãöä ÓÈíáò¿" [ÛÇÝÑ¡ 11] "ÝáÇ! ÃÞÓãõ ÈÇáÔÝÞ æÇááíáö æãÇ
æÓóÞ æÇáÞãÑö ÅÐÇ ÇÊøóÓÞ áóÊÑßÈõÜäøó ØóÈóÞðÇ [ÍÇáÇð] Úä ØóÈóÞ."
[ÇáÇäÔÞÇÞ¡ 16 æ17 æ18 æ19 æ20]﴾
Le fait de considérer les « erreurs » du Coran
comme signes d’éloquence montre un grand complexe d’infériorité
chez les Arabes polythéistes (Gentils), complexe dû aux
railleries et aux offenses des Gens du Livre contre les Arabes
qui n’avaient pas de livre sacré équivalent à l’identité.
Les lacunes,
les suppressions peuvent avoir une signification. Par exemple,
contrairement à la Bible (la Genèse 22 : 6-7 et l’Épître aux
Hébreux 11 : 17-18)[21],
le Coran ne nomme pas le fils « sacrifié » de façon explicite
dans la sourate 37 (Aṣ-ṣāffāt [les Rangés], versets 101-107)[22]
qui rapporte l’histoire du sacrifice d’Abraham. La suppression
du nom d’Isaac du texte arabe semble exprès en vue de préparer
le terrain à l’interprétation pour mettre Ismaël le père des
Arabes à la place d’Isaac l’un des ancêtres des Juifs. Les
musulmans considèrent qu’Ismaël a reconstruit avec son père
Abraham la Ka’ba. Ils voulaient ainsi mettre l’islam dans la
lignée des autres religions abrahamiques et par la suite lui
donner la légitimité d’une véritable religion monothéiste
indépendante et non pas une secte.
***
*** ***
[1]
Ce texte est une traduction adaptée du texte arabe
intitulé : « ÃÎØÇÁ ÇáÞÑÂä
ÇááÛæíÉ æÇáÅäÔÇÆíÉ : ÞÑÇÁÉ ÊÝßíßíÉ » [« Les
erreurs linguistiques et stylistiques du Coran : une
lecture déconstructrice »], avec des ajouts et
suppressions. Cette traduction adaptée a été préparée
pour participer aux deuxièmes rencontres organisées par
la Halqa (l’Association des doctorants travaillant sur
les mondes musulmans aux époques moderne et
contemporaine) jeudi 5 et vendredi 6 juin 2014 à
Aix-en-Provence (MMSH [la Maison méditerranéenne des
sciences de l’homme]). (http://halqa.hypotheses.org/1621).
[3]
Jacques Derrida, Entretien inédit enregistré le 30 juin
1992.
[4]
Tschumi, Raymond, A la recherche du sens, L’Âge d’Homme,
1987, p. 53.
[5]
Le verset 5 de la sourate Al-Ḥajj :
"íÇ ÃíåÇ ÇáäøóÇÓõ Åöäú ßäÊã Ýí ÑóíúÈò ãä ÇáÈÚËö ÝÅäøóÇ
ÎóáóÞúäÇßã ãä ÊÑÇÈò Ëã ãä äØÝÉò Ëã ãä ÚáÞÉò Ëã ãä ãÖÛÉò
ãõÜÎóÜÜÜáøóÞÉò æÛíÑö ãõÎóáøóÞÉò áäõÈóíøöäó áßã
æäõÞöÜÜÑøõ Ýí ÇáÃÑÍÇãö ãÇ äÔÇÁ Åáì ÃÌáò ãÓãøìð Ëã
äõÎúÑÌõßã ØÝáÇð Ëã áöÊóÜÜÈúáõÛæÇ ÃÔõÏøóßã æãäßã ãä
íõÊóæÝøóì æãäßã ãä íõÑóÏøõ Åáì ÃÑÐáö ÇáÚõãõÑö áßíáÇ
íóÜÜÚúÜÜáóãó ãöä ÈóÚúÏö Úöáúãò ÔíÆÇð. æÊóÑì ÇáÃÑÖó
åÇãÏÉð ÝÅÐÇ ÃäÒáúäÇ ÚáíåÇ ÇáãÇÁó ÇåÊÒøóÊ æÑóÈóÊú æÃäÈÊóÊ
ãä ßõáøö ÒóæÌò ÈåíÌò."
« Humains,
vous demeureriez dans le doute quant à la Résurrection ?
Eh bien ! nous vous avons créés de poussière, puis d’un
peu de liquide, puis d’une adhérence, puis d’une mâchure,
soumise à création échelonnée, cela pour vous démontrer
(Notre pouvoir). Et Nous fixons dans les matrices ce que
bon Nous semble, jusqu’à un terme déterminé, et puis
enfin Nous vous faisons sortir enfant, après quoi Nous
visons à vous faire atteindre votre force adulte ; et
certains parmi vous sont recouvrés (jeunes), et d’autres
ramenés au plus débile de l’âge, au point de ne rien
connaître après avoir connu. Ainsi vois-tu la terre
languir, et quand Nous faisons descendre de l’eau sur
elle, s’émouvoir, gonfler, faire pousser un peu de
chaque merveilleuse espèce ». [traduction de Berque]
[6]
Al-Ḥarīrī, Abū Mūsā [Joseph Azzi],
ÇáÚáæíæä ÇáäÕíÑíæä ÈÍË Ýí
ÇáÚÞíÏÉ æÇáÊÇÑíÎ [ʾAl-ʿAlawyīūn
an-Nuṣayryīūn. Baḥth fī al-ʿaqīda wa at-tārīkh [Les
alaouites nusayrites : Traité dans la doctrine et
l’histoire]], série :
"ÇáÍÞíÞÉ ÇáÕÚÈÉ"
[« ʾAl-ḥaqīqa Aṣ-Ṣaʿba » [« La difficile vérité »]],
2ème édition, Beyrouth, 1984. Les alaouites considèrent
l’alcool comme licite et recommandé pour la communion. À
propos de la licéité du vin, voir pp. 68, 69, 102, 105,
111, 122, 133 [dans la version électronique du livre].
La tradition alaouite rapporte un célèbre et beau poème
écrit par Al-Muntajab Al-ʿānī, un éminent poète et
théologien alaouite. Ce poème qui commence par Mil
yumnatan balwa l-ʿaqīqi wa bānihī (ãöáú
íõÜãäóÉð Èáæì ÇáÚÞíÞö æÈÇäåö) met l’accent sur le
caractère sacré du vin et souligne l’idée que le taḥrīm
[prohibition] est un takrīm [signe de respect et
d’honneur] (l’interdit est la conséquence du sacré) :
"- æÃÌáøóÜåÇ ÇáãÎÊÇÑõ Úä íÏö ÌÇåáò / Ãæ ÌÇÍÏò íÕÈæ Åáì
ÔíØÇäåö.
- æÃÑÇÏó ÅÊãÇãó ÇáßãÇáö áÔÃäåÇ / ÝÃÊì áåÇ ÇáÊÍÑíãó Ýí
ÞÑÂäåö."
De
point de vue linguistique, philosophique et ésotérique,
l’interdiction du vin [al-khamra] n’est pas un signe
d’hommage et de respect au buveur, mais plutôt au vin
lui-même que l’on appelle en arabe : bint al-karma [fille
de la vigne]. Le substantif karma [vigne] et le nom
d’action takrīm [hommage, respect] ont la même racine.
Puisque la khamra [le vin] (féminin) est la fille de la
karma [vigne], elle est mukarrama [vénérée, respectée],
et elle jouit d’un statut de ḥurma [caractère sacré],
voir elle est une ḥurma [chose sacrée]. Comme signe de
respect, le terme ḥurma désigne aussi l’épouse. La
relation avec la khamra [vin] ressemble à la relation
avec la femme, relation régie par le respect. C’est pour
cela qu’au sujet du vin, les alaouites établissent un
lien étroit entre le concept de taḥrīm [interdiction] et
celui de takrīm [respect, hommage] en disant : Al-khamra,
kurrimat fa-ḥurrimat [Le vin, puisqu’il est respecté,
est interdit]. Cependant, le terme khamr (masculin)
désigne l’état de l’ivresse qui est dû à l’abus du vin,
c.à.d. à l’utilisation abusive et sans respect de la
khamra (féminin). Le khamr est donc le sacrilège de la
khamra. Le Coran n’a pas du tout condamné la khamra,
mais le khamr en le qualifiant de rijs [sacrilège,
action illicite, saleté] (verset IV, 90).
[9]
Voici le verset 61 de la sourate XXIV An-Nūr [la Lumière] :
"áíÓ Úáì ÇáÃÚãì ÍÑóÌñ æáÇ Úáì ÇáÃÚÑóÌö ÍÑóÌñ æáÇ Úáì
ÇáãÑíÖö ÍÑóÌñ æáÇ Úáì ÃäÝõÓößã Ãäú ÊÃßõáæÇ ãä ÈõíõæÊößã
Ãæ ÈõíõæÊö ÂÈÇÆßã Ãæ ÈõíõæÊö ÃãøóåÇÊößã Ãæ ÈõíõæÊö
ÅÎúæÇäößã Ãæ ÈõíõæÊö ÃÎóæóÇÊößã Ãæ ÈõíõæÊö ÃÚãÇãößã Ãæ
ÈõíõæÊö ÚãøóÇÊößã Ãæ ÈõíõæÊö ÃÎæÇáößã Ãæ ÈõíõæÊö
ÎÇáÇÊößã Ãæ ãÇ ãóáóßúÊã ãÝÇÊöÍóå Ãæ ÕÏíÞößã. áíÓ Úáíßã
ÌõäÇÍñ Ãäú ÊÃßõáæÇ ÌãíÚÇð Ãæ ÃÔÊÇÊÇð. ÝÅÐÇ ÏóÎóáúÊã
ÈõíõæÊÇð ÝÓóáøöãæÇ Úáì ÃäÝõÓößã ÊÍíøóÉð ãäú ÚäÏö Çááåö
ãõÈÇÑóßÉð ØíøöÈÉ." (ÇáäæÑ¡ 61) [ÈÍÓÈ ÇáØÈÑí¡ ÝÞÏ ÇÎÊáÝ
ÇáÑæÇÉõ Ýí ÃÓÈÇÈ ÇáäÒæá. æÇÎÊáÝ ÇáãÝÓøöÑæä Ýí ÇáãÚäì.]
« Il
n’y a aucune gêne pour l’aveugle, le boiteux, le malade,
et pour vous-mêmes de manger dans vos maisons, dans
celles de vos pères, de vos mères, de vos frères, de vos
sœurs, de vos oncles paternels, de vos tantes
paternelles, de vos oncles maternels, de vos tantes
maternelles, dans celles dont vous possédez les clefs,
ou chez votre ami. Nul grief sur vous, non plus, à
manger ensemble, ou en divers [groupes]. Lorsque vous
entrez dans des maisons, saluez-vous mutuellement, d’une
salutation de la part de Dieu, bénie et bonne. » (XXIV,
61) [traduction de Sami Aldeeb] [Selon Aṭ-Ṭabarī, les
ruwāt [pl. de rāwī, les transmetteurs des hadiths] se
sont divisés à propos des asbāb an-nuzūl [les causes,
les circonstances ou le contexte historique de
l’énonciation ou de “la rédaction” du Coran]. Les
exégètes se sont aussi divisés à propos du sens.]
[10]
Ahmed Hasan Ali Al-Gubbanchi [Al-Qubanji] : un
intellectuel libéral et traducteur irakien musulman, né
à Najaf en 1958. Il propose un « islam civil »
compatible avec les droits de l’homme, la justice et les
circonstances modernes. Il pense que l’interprétation
littérale du Coran conduit au sous-développement des
sociétés musulmanes. Il considère que la charia est
modifiable en fonction de la société, de l’époque et du
lieu. L’une des preuves est que des versets du Coran ont
été modifiés au temps même du prophète (le naskh). Il a
également traduit en arabe de nombreux livres du
philosophe iranien Abdul Karim Soroush (né en 1945). Al-Gubbanchi
critique leʾiʿjāz balāghī [l’inimitabilité rhétorique]
du Coran et notamment la faiblesse et le verbiage du
verset susmentionné (XXIV, 61) dans une conférence
disponible sur les liens :
http://www.youtube.com/watch?v=zJ9S2hsQPtw;
http://www.youtube.com/watch?v=_x_-uPEBGvo.
[12]
Dans un seul cas, le pronom possessif suffixal -ī
apparaît dans le mot dīnī à la fin du verset court XXXIX
[Az-Zumar] [les Groupes], 14 (Þõáö
Çááåó ÃóÚúÈõÏõ ãõÎúáöÕÇð áåõ Ïöíäí Quli llāha ʾaʿbudu
mukhliṣan lahū dīnī. [Dis : « C’est Dieu que j’adore, en
lui vouant ma religion. »] [traduction Aldeeb]). Ce
verset-là ne ferait pas partie, semble-t-il, du corps de
la sourate, mais il s’agirait ou bien d’un commentaire
du verset précédent 11, ou bien d’une phrase tirée d’un
autre contexte et d’un autre discours, ou bien d’un
verset incomplet.
[13]
Le mot ʿibād[ī] (Mes serviteurs) apparaît
exceptionnellement sans -ī au milieu des trois versets
XXXIX, 10 et 16 ; et XLIII, 68. Il s’agirait là d’un
procédé d’élision proche du vocatif apocopé (tarkhīm al-munādā) ;
ou bien il s’agit d’une erreur ou d’une omission. Le
grammairien Ibn Yaʿīsh An-Naḥawī (1159-1245), dans Sharḥ
al-Mufaṣṣal (un livre qui commente Al-Mufaṣṣal
d’Az-Zamakhsharī), souligne que l’élision du pronom
possessif du locuteur (-ī) au vocatif est plus courante.
Ainsi, selon lui, il est plus éloquent de dire yā ʿibād[i],
au lieu de yā ʿibādī.
[14]
Le terme rasm (le tracé ou le ductus consonantique)
désigne la manière de tracer les signes de l’écriture du
Coran.
[15]
Antoine Compagnon (Le Démon de la théorie, 1998, p. 86)
souligne : « Le parallélisme de deux passages sera
pertinent si et seulement s’ils renvoient à une
intention cohérente : le mot « solitude » dans Le Spleen
de Paris n’éclaire pas nécessairement le mot
« solitude » dans Les fleurs du mal ; Baudelaire, qui
réclamait le droit de se contredire, a pu changer d’avis
entre-temps. » N’ayant pas, semble-t-il, un seul auteur,
le Coran avait cependant une seule autorité de
compilation (le calife ʿUthmān et le comité de
compilation), i.e. une intention cohérente, ce qui
pourrait contribuer à normaliser sa terminologie.
[16]
Dans l’introduction de son Majāz al-Qurʾān (p. 3), Abū ʿUbayda
Maʿmar b. Al-Muthannā (728-824) souligne comme exemple :
"æãöä ãóÌÇÒ ãÇ ÌÇÁÊ ãÎÇØÈÊõå ãÎÇØÈÉó ÇáÔÇåÏ¡ Ëã ÊõÑßÊ
æÍõæøöáóÊú ãÎÇØÈÊõå åÐå Åáì ãÎÇØÈÉ ÇáÛÇÆÈ¡ ÞÇá Çááå:
"ÍÊì ÅÐÇ ßäÊã Ýí ÇáÝõáß æÌÑóíäó Èåã"¡ Ãíú: "Èßã".
[ÇáÓæÑÉ 10 íæäÓ¡ ÇáÂíÉ 22]".
« Et
parmi les majāz [les exceptions, les licences] dans le
passage soudain de la deuxième personne à la troisième
personne [nous citons ce que] Dieu dit : « Lorsque vous
êtes sur les felouques, que celles-ci courent avec eux »,
i.e. « avec vous ». [sourate X Jonas, 22] [traduction de
Sami Aldeeb]. »
[18]
Bellos, David, Le poisson et le bananier : Une histoire
fabuleuse de la traduction, traduit par : Daniel Loayza,
Flammarion, 2012, p. 181.
[20]
L’énallage est une figure de style qui consiste à
remplacer une forme grammaticale [un pronom, un nom, un
temps verbal ou un aspect verbal] par une autre.
[21]
Genèse 22 : 6-7 : « Abraham prit le bois pour
l’holocauste, le chargea sur son fils Isaac, et porta
dans sa main le feu et le couteau. Et ils marchèrent
tous deux ensemble. Alors Isaac, parlant à Abraham, son
père, dit : Mon père ! Et il répondit : Me voici, mon
fils ! Isaac reprit : Voici le feu et le bois ; mais où
est l’agneau pour l’holocauste ? »
Épître aux Hébreux 11 : 17-18 : « C’est par la foi
qu’Abraham mis à l’épreuve, offrit Isaac en sacrifice.
Ainsi celui qui avait reçu les promesses, et à qui il
avait été dit : "C’est d’Isaac que naîtra ta postérité",
offrit ce fils unique… »
[22]
La sourate Aṣ-ṣāffāt, les Rangés, versets 101-107 :
"(101) ÝÈÔøóÑäÇå ÈÛõáÇãò [ø] Íáíã. (102) ÝáãøóÇ ÈáóÛó
[ø] ãÚå ÇáÓÚíó ÞÇáó: "íÇ ÈõÜÜÜäíøó [ø]! Åäí ÃÑì Ýí
ÇáãóäÇã Ãäí ÃÐÈÍßó. ÝÇäÙõÑú ãÇÐÇ ÊóÑì¿" ÞÇáó [ø]: "íÇ
ÃÈóÊö! ÇÝúÚáú ãÇ ÊõÜÜÜÄúãÑõ. ÓÊÌÏäí Åä ÔÇÁ Çááåõ ãöä
ÇáÕÇÈÑíä". (103) ÝáãøóÇ ÃÓáãÇ æÊóÜÜÜáøóÜÜÜÜÜÜåõ [ø]
ááÌÈíä¡ (104) æäÇÏíäÇå Ãäú íÇ ÅÈÑÇåíãõ! (105) ÞÏ
ÕóÜÜÜÏøóÞúÜÜÜÊó ÇáÑÄíÇ. ÅäøóÇ ßÐáß äóÌÒí ÇáãõÍÓäíä.
(106) Åäøó åÐÇ áåæ ÇáÈáÇÁ ÇáãõÈíä. (107) æÝÏóíäÇåõ [ø]
ÈÐöÈÍ ÚÙíã."
« [101] Nous lui annonçâmes un garçon [ø] magnanime.
[102] Lorsqu’il [ø] parvint [à l’âge] de s’empresser
avec lui, [Abraham] dit : « Ô mon fils [ø] ! Je me vois
dans le sommeil en train de t’immoler. Regarde donc ce
que tu vois ». Il [ø] dit : « Ô mon père ! Fais ce qu’il
t’a été ordonné. Tu me trouveras, si Dieu [le] souhaite,
au nombre des endurants ». [103] Puis quand tous deux se
furent soumis et qu’il l’[ø]eut jeté sur la tempe, [104]
nous l’avons interpellé : « Ô Abraham ! [105] Tu as
confirmé la vision. Ainsi rétribuons-nous les
bienfaisants ». [106] Ceci est le test manifeste. [107]
Nous le [ø] rachetâmes d’une très grande immolation. » [traduction
de Sami Aldeeb]