Sécurité
commune
Les dissuasions militaires, qu’elles soient
classiques ou nucléaires, sur lesquelles les sociétés prétendent fonder leur
défense sont organisées de telle manière qu’elles puissent être perçues
comme une menace permanente par les armées et les populations civiles de
l’adversaire potentiel. Elles se présentent donc, de fait, comme des
dissuasions « agressives ». Certes, l’intention déclarée qui les
justifie, les fonde et les anime est défensive, mais les moyens mis en œuvre
pour les préparer, les organiser et les rendre crédibles ont pour fonction de
donner aux décideurs politiques la capacité d’infliger à l’adversaire des
dommages suffisamment importants pour qu’ils lui apparaissent inacceptables.
Ainsi, les décideurs se placent délibérément dans une « posture
agressive », afin de bien faire comprendre à l’adversaire potentiel
qu’ils ont non seulement les moyens, mais également la volonté de leur faire
subir des destructions irréparables dès lors que leurs intérêts vitaux
seraient menacés. Et l’adversaire entend procéder de même.
Cette « paix armée » repose ainsi sur un
équilibre des menaces qui risque d’être déstabilisé par une crise
politique au cours de laquelle chacun des deux adversaires pourrait craindre une
attaque préventive de l’autre. Face à ce risque, les peuples et les nations
ont le plus grand intérêt à assurer leur défense non plus par la mise en œuvre
d’une « menace réciproque », mais par la recherche d’une
« sécurité commune ». Celle-ci ne consiste pas à considérer
l’adversaire comme un ami et elle n’est pas fondée sur une confiance
mutuelle. Elle prend appui sur le fait que notre adversaire a autant besoin d’être
en sécurité que nous-mêmes et que, par-delà nos défiances réciproques,
nous avons le même intérêt vital à assurer notre défense par des moyens qui
n’impliquent pas le risque de nous détruire ensemble.
Dans cette perspective, la sécurité commune nous amène
à faire reposer notre défense non plus sur des dissuasions « agressives »
mais « défensives ». Il ne s’agit plus de dissuader en menaçant
l’adversaire de destructions inacceptables, mais en le persuadant que nos
moyens de défense feraient échouer toute tentative d’agression de sa part et
que son entreprise aurait toute chance d’être largement déficitaire. Ainsi,
une telle dissuasion permet aux décideurs politiques de se tenir dans une
« posture défensive » qui ne peut susciter aucune crainte chez
l’adversaire tant qu’il restera chez lui. Dès lors, si une crise politique
survient, les États rivaux se trouvent dans une position stratégique qui
facilite grandement le maintien du conflit sur le terrain diplomatique où il
doit trouver sa solution. Il est possible d’imaginer certaines formes de défense
armée qui permettraient d’organiser une force de dissuasion défensive. Mais
c’est certainement la défense civile non-violente qui est la plus appropriée
à l’objectif d’une sécurité commune.
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