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La Syrie et le Mandat français (1920-1946)

 

Samir ANHOURY

 

Introduction : colonisation et empires coloniaux  

Dans la succession des âges, la Méditerranée est peut être la grande école de la colonisation. Dans un premier temps, il semble bien acquis qu’un mouvement migratoire continu aurait porté les peuples d’Asie aux bords de la Méditerranée, lieu de rencontre de trois continents, qui restera longtemps le centre vital du monde ancien et civilisé. Dans un deuxième temps, ce fut un mouvement inverse, poussant les peuples greco-latins à la conquête de l’Asie.

Tour a tour, Phéniciens, Grecs, Romains, Arabes, Turcs ont conquis cette mer et ses rivages, brassant les races et les cultures, échangeant produits et denrées et créant au fil des âges une civilisation flamboyante, unique et jamais égalée, qui est celle du monde méditerranéen.

Depuis Alexandre le Grand, vainqueur des perses de Darius en 334 av. J.C., l’hégémonie de la pensée hellénistique s’étend sur l’Orient, l’Afrique du Nord et en Asie centrale jusqu’au bassin de l’Indus. Dès lors, le duel de l’Occident et de l’Orient s’engage sur une durée de deux millénaires, pour l’hégémonie temporelle et spirituelle du monde.

Les premiers comptoirs et colonies phéniciens fondés sur le pourtour méditerranéen au XIIIe siècle av. J.C., établis par conquête militaire ou d’une manière pacifique, préfigurent déjà le formidable empire de Rome s’étendant depuis les II–I siècles av. J.C. sur trois continents. Cet empire qu’on pourrait appeler colonial dans sa demande d’expansion, a besoin, pour sa sécurité et sa conservation, d’énormes quantités de matières premières, de produits et de denrées alimentaires, fournis, de gré ou de force, par les peuples des pays conquis.

Les grands conquérants n’ont cessé depuis, l’Antiquité jusqu’à nos jours, de rêver de l’Orient. Ont succombé à ce « rêve d’Orient », qui ne fut parfois qu’un simple mirage : Alexandre, César et Pompée, la reine Zénobie, puis les chefs des Croisades et, plus près de nous, Napoléon, les grands Empires coloniaux modernes, russe, français, anglais, puis des dictateurs, tels Mussolini et Hitler, et, encore beaucoup plus près et même récent, l’empire américain, seul héritier des anciens empires maintenant disparus, mais dont le système politique, beaucoup plus pervers que celui des puissances coloniales précédentes, couvre ses buts coloniaux et hégémoniques par une démocratie de façade, cultivant et couvrant tous les excès.

Après la chute de l’empire romain et l’émergence de nouveaux empires et puissances méditerranéennes, arabes en Orient, en Afrique du Nord et en Espagne, petits états latins du Levant, fondés par les Croisés sur le littoral syrien, turcs seldjoukides puis ottomans en Asie Mineure, la lutte entre Occident et Orient s’intensifie durant toute la première moitié du second millénaire, échelonnée de dates historiques et décisives :

Expulsion des derniers Croisés de Syrie en 1291, chute de Constantinople aux mains des Ottomans en 1453, chute de Grenade en 1492, reconquise par les rois catholiques.

À partir de ces dates, une nouvelle carte politique se dessine en Europe et en Orient, marquée par un événement majeur, l’âge d’or et de deux nouveaux et puissants empires. Celui d’Espagne au début du XVIe s. qui, outre ses conquêtes coloniales d’Amérique, incorpore les territoires autrichiens et européens des Habsbourg.

L’autre est celui des Ottomans avec son expansion en Europe : Thrace, Macédoine, Bulgarie, Serbie, Bosnie et Hongrie, jusqu’aux portes de Vienne (1529), et son expansion en Orient : Syrie, Palestine et Égypte, et sa domination sur l’Algérie, la Tunisie et la Tripolitaine.

Ces deux empires, luttant pour la domination de l’Europe et de la Méditerranée, devaient fatalement s’opposer l’un à l’autre. Sur mer, la flotte ottomane subit un désastre à la bataille de Lépante (1571). Sur terre, un très grave échec devant Vienne (1683) marque le recul des Ottomans en Europe.

Quant à l’Espagne, la défaite maritime de l’invincible Armada (1588) contre l’Angleterre prélude au déclin de l’empire.

À ces deux déclins correspond la montée en force et en puissance des royaumes de France et d’Angleterre, qui commencent à réaliser une politique expansionniste et coloniale vers tous les autres continents : Canada et Amérique, Afrique et Asie. Un peu plus tard, commence l’ascension de l’empire russe sous Catherine la Grande, qui s’agrandit aux dépens de l’empire ottoman (1774) et de la Pologne (1792-1795). À partir de ce moment, se mettent lentement en marche des forces, des conflits et des intérêts, complémentaires ou contradictoires, qui pèseront lourdement, au début du XXe s., sur le destin du monde en général et de notre monde arabe en particulier.

En effet, le début du XXe s. c’est l’apogée de la puissance coloniale, qui est en même temps la grande période de l’envahissement de l’Univers par « l’impérialisme européen ».  

Damas, le 3/3/2003

***

La Syrie et le mandat français (1920-1946)

Lors de la création du monde,

l’Intelligence dit : « Je vais en Syrie ».

L’esprit de Discorde ajouta : « J’y vais avec toi ».

Vieux dicton syrien

 

Dans la première partie de cet article, nous avons essayé d’expliquer le long processus, étalé sur plusieurs siècles, qui avait vu se construire et se composer, dans le monde du XIXe s. et le début du XXe s., les grands empires coloniaux d’Europe et celui de la Turquie ottomane dont faisait partie, depuis le début du XVIe s., la Syrie. À cette époque, l’expansion coloniale était arrivée à son point culminant, faisant de la Grande Bretagne le maître du plus vaste empire colonial suivi en deuxième position par la France.

Par la force des choses, ces deux puissances rivales, dont les intérêts politiques et commerciaux étaient souvent en conflit, se sont fait la guerre à plusieurs reprises sur mer et sur terre : guerres napoléoniennes, guerre d’Indépendance de l’Amérique, perte pour les Français des établissements en Inde et de territoires au Canada, etc. ; mais elles se sont aussi alliées contre un ennemi qui menaçait leurs intérêts communs : guerre de Crimée contre la Russie, où les deux puissances s’étaient alliées avec les Turcs, puis retournement d’alliance durant la première guerre mondiale 1914-1918, où les Anglais les Français et les Russes s’alliaient contre les empires allemand, austro-hongrois et turc ottoman. Trois décennies plus tard, le conflit d’intérêts au Moyen Orient, dont bénéficient la Syrie et le Liban sous mandat français et facteur déterminant de l’évacuation des troupes françaises du Levant en 1946.

À la fin du premier conflit mondial (1914-1918), quatre empires venaient de s’écrouler : L’empire russe, l’empire austro-hongrois, l’empire allemand et l’empire ottoman. Ce dernier disparaissait, laissant la place à une Turquie « turque », purgée de ses Arméniens, massacrés, de ses Grecs, chassés, et de ses Arabes, dont l’histoire, sans éclat depuis plusieurs siècles, allait se remplir de bruit et de fureur. L’« Homme malade » de l’Europe (l’empire ottoman) était bien décédé et il ne restait aux puissances coloniales victorieuses, l’Angleterre et la France, qu’à se partager sa dépouille.

À ce stade du récit, il serait utile de définir en résumé ce que fut la théorie du système mandataire telle qu’imaginée par les puissances alliées : France, Angleterre, États-Unis et Italie, sorties victorieuses de la Première guerre mondiale. L’idée consiste donc à placer les territoires détachés des empires défunts, en l’occurrence ceux de l’Allemagne et de la Turquie, sous la tutelle de la Société des nations (ancêtre de l’actuelle ONU). Tout comme l’Allemagne perd ses colonies africaines, l’empire ottoman renonce à toutes ses provinces arabes. La France hérite donc de la Syrie et du Liban, alors que la Grande Bretagne hérite de l’Iraq et de la Palestine. La Société des nations confie à ces deux puissances le soin d’amener les nouveaux « états » à un degré suffisant de maturité politique et de développement économique, leur permettant d’accéder à l’indépendance et à la souveraineté.

Le Levant devient donc un champ d’expérimentation d’une nouvelle trouvaille du droit international, premier et dernier exercice du genre dans les annales de la politique internationale !

L’échec de cette politique pourrait être résumé dans ces deux anecdotes humoristiques, la première citée par Henry de Jouvenel, ancien Haut-commissaire en Syrie en 1926, racontant une conversation qu’il avait eue avec un ancien ministre turc au temps où la Syrie était encore une province Turque :

-          Oh ! Gardez-la ! Et surtout gardez Damas. C’est une de ces villes qui empoisonnent les empires !

La seconde anecdote vient de Joseph Kessel (journaliste et écrivain), venu en Syrie en 1927 se rendre compte des progrès de la pacification (après le soulèvement nationaliste des années 1925-1926) : « Il apparaît que tous les systèmes y sont vains, car nul pays n’est plus complexe, plus difficile, plus révolté par nature que la Syrie. »

Mais avant d’en arriver au système mandataire et à son application dans cette région de monde, résumons, aussi brièvement que possible, les événements historiques précédant la fin de la Première guerre mondiale, susceptibles d’éclairer l’émergence de la Syrie moderne au début du XXe s.

Après la fin des royaumes francs en Syrie au XIIIe s., François 1er, roi de France, entreprend une politique de rapprochement (jugée scandaleuse par l’Europe chrétienne de l’époque) avec le sultan ottoman Soliman le Magnifique, obtenant par le traité de 1535 des avantages et privilèges importants pour ses ressortissants et son commerce avec l’empire ottoman, à la faveur du système des « capitulations ». (Ces intérêts séculaires seront rappelés plus tard par la France pour réclamer sa souveraineté sur la Syrie et le Liban à la suite de la défaite turque et du démantèlement de ses provinces arabes.)

Ces liens privilégiés seront renforcés au XVIIe s. par Richelieu et Louis XIV, mais l’expédition de Bonaparte en Égypte et sur le littoral syrien, puis celle de la France de Charles X en 1830 sur l’Algérie qui inaugure une présence française de 150 années en Afrique du Nord, affaiblissent la position de la France dans le monde arabe. Entre temps, la France, grâce à une politique très active dans l’Égypte de Mohammed Ali, étend son influence sur le Levant lors de l’occupation égyptienne entre 1830-1840, puis durant les massacres intercommunautaires de 1860 au Liban et en Syrie, où le sultan est incapable de réagir, avec l’envoi par Napoléon III d’un corps expéditionnaire à Beyrouth.

Dès lors, le prestige politique et moral de la France est incontestable. Son influence s’étend à tous les domaines, tant commerciaux que culturels, et son protectorat religieux est désormais reconnu sur l’ensemble des chrétiens d’Orient, évinçant en cela le Tsar russe qui revendiquait son exclusive protection sur les populations orthodoxes.

L’affaiblissement de l’empire ottoman, dès les premières décennies du XIXe s., face à l’Occident triomphant, déstabilise les fondements de l’ordre socio-politique traditionnel. l’Europe avec sa culture, sa force militaire et sa révolution industrielle devient le modèle à suivre, créant par ce fait des écarts de développement qui produisent les rapports inégaux d’une dépendance économique qui précède ici la domination militaire, puis la rupture totale entre les mondes turc et arabe. Chez les Arabes, la remise en cause des fondements de la légitimité politique se trouve au cœur du débat, ainsi que du rapport de l’Islam envers cette légitimité d’un côté, et aux valeurs de la modernité de l’autre. Cette réflexion est surtout menée par deux grands réformistes musulmans Jamalu-d-Din al-Afghani et son disciple égyptien Mohammad Abdo. D’autre part, le nationalisme naissant tente, lui aussi, d’apporter sa réponse à la question de la légitimation des pouvoirs.

Ces premiers nationalistes, qu’ils soient turcs (les jeunes-Turques d’Istanbul) ou arabes, proviennent tous d’une élite intellectuelle influencée par les idées occidentales.

C’est au cœur de cet espace intellectuel et social que se constitue le premier nationalisme, culturel avant d’être politique. À Paris, comme à Beyrouth ou à Damas, des diplomates entretiennent des rapports secrets avec des notables arabes qui formeront, plus tard et surtout après la guerre 1914-1918, l’élite du mouvement nationaliste, issu de la renaissance culturelle arabe (al-Nahda) et de l’intelligentsia urbaine, de ces villes du Levant traditionnellement ouvertes à toutes les influences extérieures.

En 1915, la France et la Grande Bretagne négocient les zones d’influence respectives des deux puissances en cas de partage de l’empire ottoman. Cet accord provisoire et secret aboutit et sera désigné par le nom des deux négociateurs : Sir Mark Sykes et François Georges-Picot.  

À cette époque, la Grande Bretagne, craignant des troubles ou même une éventuelle sédition parmi ses sujets musulmans en Égypte comme en Inde, commence à concevoir une politique musulmane dans l’empire ottoman, avançant même le thème de l’indépendance arabe, toutefois sous la forme d’un contrôle européen indéfini, source de tous les malentendus à venir. Cette idée se heurte dans l’immédiat aux ambitions impériales françaises dans la région avant de rencontrer plus tard l’opposition des peuples arabes refusant l’indépendance sous tutelle étrangère. En attendant, une correspondance s’établit, dès 1915, entre sir Henry MacMahon et le Shérif Hussein du Hedjaz, et les négociations sur le terrain engagent l’Angleterre par écrit à « reconnaître et soutenir l’indépendance des Arabes », mais obtiennent de repousser, jusqu’à la fin de la guerre, les négociations relatives au tracé des frontières.

Contre cette promesse de principe, le Shérif Hussein doit lancer en contre-partie l’appel à la révolte arabe contre les Ottomans : ce qu’il fera le 5 juin 1916, se proclamant, dès novembre 1916, « Roi des Arabes », bien que les puissances ne lui reconnaissent que le titre de « Roi du Hedjaz ». Le colonel Lawrence, membre du Bureau arabe du Caire, accompagne les troupes de l’émir Fayçal, fils du Shérif Hussein, comme officier de liaison et fournisseur de l’or anglais. Dès ce moment, les deux hommes seront liés pour un temps à un destin exceptionnel et seront considérés, sous le commandement militaire du général anglais Allenby, comme l’image emblématique de la révolte arabe jusqu’à la prise de Damas et la défaite complète des Turcs en Syrie. L’entrée des troupes anglaises le 1er oct. 1918 à Damas, puis celle de Fayçal le 3 oct., est humiliante pour la France après plusieurs siècles d’influence et de protectorat religieux au Levant. Cette victoire anglaise qui réveille de vieux antagonismes entre les alliés de la veille est due à la présence sur le terrain d’une force militaire considérable, un million d’hommes, qui témoigne de l’ampleur de l’engagement britannique en Orient, contre de maigres effectifs entretenus par la France dans la région.

Quoiqu’il en fut, Allenby et Fayçal se rendirent le même jour à Damas le 3 octobre, et firent connaissance à l’hôtel Victoria en présence de Lawrence. Un jour auparavant, soutenu par les nationalistes et politiciens damascènes locaux, Ali Riza Rikaby avait repris le contrôle du gouvernement militaire arabe des mains de Choukri Pacha al-Ayoubi, proclamé gouverneur provisoire deux jours auparavant. On avait alors hissé le drapeau chérifien et la nouvelle administration arabe avait proclamé son allégeance à Hussein en tant que roi de tous les Arabes.  

Il n’était sorti de la conférence de la paix, ouverte à Paris le 18 janvier 1919, aucun accord au sujet des mandats, et on était en train de procéder à un règlement de l’affaire à l’occasion d’une réunion des alliés à San Remo. L’attribution des mandats ne fut rien d’autre qu’un partage de gains impérialistes, rejetant les prétentions du nationalisme arabe et les bonnes intentions des États-Unis et des « quatorze points » du programme de son président Woodrow Wilson, fondé sur le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.

Durant l’absence de Faysal en Europe s’occupant à défendre en vain les intérêts arabes contre la détermination française, abandonné par ses alliés britanniques, son pouvoir en Syrie avait faibli. Les critiques contre lui devenaient virulents, surtout après l’accord Fayçal-Clémenceau à Paris le 9 janvier 1920.

Débarrassée de son allié rival britannique, la France a les mains libres sur le terrain. Sa politique en faveur de la création d’un grand Liban, ainsi que sa volonté de contrôler l’ensemble de la Syrie, rend inévitable à terme la confrontation avec Fayçal. Le 8 octobre 1919, le général Gouraud est nommé Haut-commissaire en Syrie-Cilicie, et les troupes françaises commencent à relever les Britanniques au Liban et sur le littoral syrien.  

À partir de cette date, la situation se dégrade en Syrie et les nationalistes radicaux décrètent la mobilisation générale. Le 8 mars 1920, le Congrès arabe réuni à Damas, rejetant les accords Fayçal-Clémenceau, proclame unilatéralement l’indépendance et la création d’un royaume arabe Syrien dans ses frontières naturelles, y compris la Palestine, et Fayçal comme roi de Syrie. Mais en avril 1920, la conférence de San Remo en Italie, confirmant les accords Sykes-Picot modifiés (accords sur les pétroles), donne à la France les mandats sur le Liban et la Syrie, à l’Angleterre les mandats sur la Palestine, la Syrie du sud (Transjordanie) et l’Irak.

La tension est à son comble en Syrie et au Liban, les incidents se multiplient. Le 14 juillet 1920, le général Gouraud lance un ultimatum à Fayçal. Le 24 juillet 1920, la colonne française commandée par le général Goybet marchait sur Damas. Elle comprenait d’importants effectifs : infanterie constituée surtout de bataillons et de régiments sénégalais et marocains, batteries de 75 et de 155, sections d’auto-canons et d’automitrailleuses, deux formations de chars d’assaut, des compagnies de génie, de l’aviation ainsi que des éléments de réserve.  

Damas fin Juillet 1920 - Soldat Francais et soldat Syrien  La veille de la bataille de Maisaloun 20/07/1920

Face à elles, les forces arabes commandées par le colonel Youssef al-Azmeh, ministre de la guerre, sont dérisoires. Estimées à 5000 hommes environ, constituées de toutes pièces d’un mélange de soldats, d’irréguliers, de volontaires et de bédouins et munis de quelques canons, elles sont écrasée à Khan Maysaloun aux portes de Damas et Youssef al-Azmeh est tué. Les troupes françaises font leur entrée à Damas le 25 juillet 1920. C’est l’effondrement de l’éphémère royaume arabe et le commencement du mandat français sur la Syrie qui va durer un quart de siècle. Le roi Fayçal, chassé de Syrie, part en exil en Italie. Il deviendra en 1921 Roi d’Irak jusqu’à sa mort en 1933.

Ainsi la Grande Syrie ou « Bilad al-Cham » se réduit de 300.000 km2 à 185.000 km², avec des frontières tracées à l’est et au sud-est en plein désert en ligne droite.

Dans le petit livret La Syrie-géographie élémentaire, à l’usage des écoles de G. Levenq, (Imprimerie catholique, Beyrouth, 1920), enseigné dans les écoles de Syrie, il est intéressant de lire la définition géographique humaine et historique de la Syrie telle qu’enseignée dès les premiers mois du mandat. En voici quelques extraits :

Limites et dimensions

« Quelles sont les limites de la Syrie ?

La Syrie est bornée au nord par les montagnes de l’Asie Mineure que l’on appelle « le Taurus » et par ses ramifications : L’Amanus, le Kurd Dagh ; à l’est par le désert de Syrie ; au sud par le désert qui sépare l’Asie de l’Afrique ; à l’ouest par la Méditerranée. »

« Quelles sont les dimensions de la Syrie ?

Les limites qui viennent d’être indiquées donnent à la Syrie une figuration particulière : c’est un pays plus long que large. Sa longueur dépasse 1000 km (la France est un peu moins longue), mais sa largeur n’atteint pas 200 km (la France en a 900).

Sa superficie, c’est-à-dire son étendue, est à peu près de 165.000 km². La France est quatre fois plus grande.

La population

« Quel est le nom des habitants de la Syrie ?

Tous les habitants de la Syrie peuvent à bon droit s’appeler « syriens ».

Pourquoi cela ?

Parce qu’ils représentent un fonds commun de population qui est le même depuis des siècles : populations sémites.

Quels sont les différents groupements nationaux et religieux ?

I. Les Musulmans forment la grande majorité. Ils dominent surtout dans la Syrie intérieure et dans toutes les grandes villes, sauf Beyrouth et Jérusalem.

  1. Les Métoualis, surtout établis en Syrie centrale (Liban).
  2. Les Druzes, également dans le Liban central, et depuis 1860, dans le Jabal Hauran.
  3. Les Nosairis, depuis longtemps dans la montagne qui porte leur nom, au nord du Liban.
  4. Les Ismaïliens vivent, mais très réduits, dans la montagne.
  5. Les Yézidis habitent le Jabal Sim’ân, massif qui domine le bassin fermé où se trouve Alep.

II. Les Chrétiens sont tout aussi divers, et c’est depuis le milieu du Ve siècle que la Syrie a perdu son unité religieuse.

  1. Les Maronites sont catholiques. Ils ont su se faire au Liban une véritable patrie.
  2. Les autres groupements religieux sont divisés en catholiques et orthodoxes : les Melkites vulgairement appelés « grecs », et les Syriens ou Jacobites.
  3. Les Arméniens ne sont en nombre que en Syrie du Nord.

III. Les Juifs deviennent de plus en plus nombreux en Palestine.

Les Arabes représentent la population nomade ou semi-sédentaire. Ceux qui sont en relations avec la Syrie appartiennent tous à une même branche : les Anazés.

Comment cette population est-elle répartie ?

Le pays est peu peuplé. Autant qu’on peut le savoir la population ne dépasse pas 3 1/2 millions d’habitants.

Elle est, en outre, très inégalement répartie. Le Liban, ainsi que sur la côte la région de Beyrouth, sont les régions les plus denses.

D’une façon générale, la moyenne par kilomètre carré peut aller de 13 à 8.

Pourquoi le Syrien émigre-t-il ?

Parce que le pays est pauvre ; parce qu’en Amérique spécialement il a pu jusqu’à présent arriver assez vite à l’aisance. Mais le Syrien n’émigre pas sans esprit de retour, et, en tous cas, il envoie à sa famille restée au pays, une bonne part de ses bénéfices.

Quelles sont les conséquences de l’émigration ?

L’émigration contribue à dépeupler le pays, et spécialement à affaiblir l’élément chrétien ; mais elle fournit à la Syrie un secours pécuniaire important.

Géographie politique

Quelle est la situation de la Syrie avant la guerre de 1914 ?

La Syrie faisait partie, par droit de conquête, de l’empire ottoman. Légalement, c’est par le traité de Sèvres (France) que cette situation a pris fin en août 1920.

Quel est le sort rendu à la Syrie par le traité de Sèvres ?

Remarquons d’abord qu’ici le mot SYRIE n’a plus le sens que nous lui avons donné en géographie, où il comprend la Palestine. Ici, il s’en distingue.

L’empire ottoman renonce à toutes prétentions sur ce pays et se trouve d’accord avec les autres signataires pour que la Syrie soit reconnue ÉTAT INDEPENDANT, à la condition que les conseils et l’aide d’un mandataire guide son administration jusqu’au moment où elle sera capable de se conduire seule (art. 94, 1er alinéa).

Quel est le mandataire pour la Syrie ?

C’est la France.

Qu’à-t-il été statué pour la Palestine ?

L’Administration de la Palestine, dans les frontières qui seront déterminées par les principales puissances alliées, sera confiée à un mandataire, responsable de l’exécution de l’établissement d’un foyer national pour le peuple juif. Le mandataire de la Palestine est l’Angleterre.

Géographie administrative

Quelles étaient les divisions administratives de la Syrie avant 1914 ?

La Syrie était divisée en vilayets, subdivisés à leur tour en sandjaks, et en cazas.

Les vilayets étaient ceux d’Alep, de Beyrouth, de Syrie dont il y avait en outre deux sandjaks, jouissant d’une situation particulière : le sandjak autonome de Jérusalem, avec les cazas de Jaffa, Jérusalem, gaza et Hébron, et le sandjak autonome du Liban.

Quelle était la situation du Liban ?

Le Liban, tel qu’il a existé jusqu’en 1920, a été définitivement créé par le statut de 1864. En droit faisant partie de l’empire ottoman, en fait presque indépendant. Son mutessarif qui devait être chrétien, d’une des confessions non dominantes au Liban, était nommé pour cinq ans. Il était assisté d’un conseil administratif élu de 13 membres (Mejless). Le Liban était divisé en 7 cazas.

Quelle est la nouvelle organisation de la Syrie ?

L’ancienne organisation n’a pas été maintenue.

La puissance mandataire a procédé à une nouvelle répartition politique, comme à une nouvelle division administrative. Cette réforme a consisté :

  1. À agrandir le Liban administratif de 1864 et à en faire un état indépendant appelé « Grand Liban ».
  2. À réserver au reste du pays le nom de « Syrie » et à la diviser en 3 parties autonomes : le gouvernement de Damas ; le gouvernement d’Alep, et le territoire des Nosairis, qui sont désormais appelés officiellement Alaouites.

Quelle est la division administrative du Grand Liban ?

Cet état est divisé en quatre sandjaks et deux municipalités autonomes :

-          Le Liban Nord, chef-lieu Zgarta.

-          Le Mont Liban, chef-lieu Baabda.

-          Le Liban sud, chef-lieu Saïda.

-          La Bequa‘, chef-lieu Zahlé.

-          Le territoire autonome de Beyrouth et sa banlieue.

-          Le territoire autonome de Tripoli et sa banlieue.

Beyrouth est la capitale du nouvel état.

Le Liban a été agrandi. Sur la côte, il acquiert deux grandes villes, Beyrouth et Tripoli. Mais les plus notables agrandissements sont à l’intérieur : cazas de Hasbaya, Rachaya, Moallakat, Baalbek, tous pays de céréales.

Quels sont les divisions administratives en Syrie ?

  1. Le territoire autonome des Alaouites comprend deux sandjaks et une municipalité autonome : le sandjak de Lattaquié et celui de Tartous, chef-lieu Tartous. La ville de Lattaquié forme une municipalité autonome.
  2. Le gouvernement autonome d’Alep comprend, outre les territoires de l’ancien vilayet qui sont sous le mandat français, les « Nahiés » d’al-Bougaq et de Bâyir, qui se trouvaient dans le sandjak de Lattaquié.
  3. Le gouvernement autonome de Damas est, d’une façon générale, l’ancien vilayet de Syrie, mais diminué des territoires devenus libanais, et aussi de ceux qui sont attribués à la Palestine.

Sauf Alep, les grandes villes de la Syrie intérieure : Hama, Homs, Damas sont sur son territoire.

Conclusion

Tel est ce pays. Son histoire est déjà longue et aucune autre région n’est aussi riche en souvenirs. La Phénicie a eu les premiers colonisateurs. La Palestine a été le pays du « peuple de Dieu », et est devenu le berceau de la religion chrétienne. La Syrie a connu, sous les Romains et les Byzantins, une brillante prospérité. Mais, tous ces témoins disparus, la terre qui les a portés demeure et s’offre à nous, après tant de siècles, pour une étude féconde.

Ainsi, dans ce petit livret de 24 pages destiné aux élèves de Syrie et du Liban, la puissance mandataire expliquait d’une manière simple et claire son programme politique et administratif, pensé et établi à l’évidence bien avant la date de l’occupation de la Syrie, et source de malentendus et d’incompréhension entre les deux parties concernées, débouchant parfois à des tensions profondes et dramatiques.

Indépendance, Grand Liban, états autonomes de Syrie, foyer national pour les Juifs en Palestine : quatre points majeurs, objets de lutte, de tension et d’instabilité politique, depuis 1918 et jusqu’à nos jours dans toute la région du Moyen Orient.

La Syrie sous mandat a été gouvernée successivement par 12 Hauts commissaires français, un 13e, Jean Chiappe, nommé deux jours plus tôt, meurt avant d’arriver à destination. Son avion est abattu en Méditerranée le 17 nov. 1940, lors d’un combat aérien entre aviations anglaise et allemande. Parmi ces douze Haut-commissaires, six étaient des militaires et les six autres des civils, diplomates ou haut-fonctionnaires. Il est intéressant de noter que la politique française au Levant a été exercée d’une manière directe par les généraux Gouraud, Weygand et Sarrail entre 1920-1925, tous les trois chefs militaires prestigieux de la guerre 1914-1918 et imprégnés d’esprit colonial. Après la fin des troubles et de la grande révolte syrienne en 1925-1926, la Syrie fut gouvernée d’une manière relativement libérale, avant de reprendre la voie de l’administration directe au commencement de la Seconde guerre mondiale en 1939. Ainsi le mandat fut inauguré en 1925 par un militaire, le général Gouraud, et un autre militaire le général Beynet achevait, le 15 avril 1946, l’évacuation des troupes française en Syrie.  

Damas bombardee, le 20 octobre 1925 Juillet 1922, manifestation a Alep pou la mise en liberte de Ibrahim Hananou

Cet article relevant plus du domaine culturel que du domaine historique ou académique, il serait trop long d’évoquer ici toute l’histoire extrêmement compliquée et riche en événements de la période du mandat. À ce sujet, j’adresserai le lecteur à la bibliographie citée en dernière page, susceptible d’offrir une matière bien documentée relative à cette période.

Toutefois j’essayerai de dresser un bref bilan de l’action de la France en Syrie seulement, (bien que l’histoire du Liban fut souvent très étroitement associée à celle de la Syrie durant cette période), et ce qu’il en est resté dans l’Histoire ou dans la mémoire collective.

En ce qui concerne l’Histoire, cette action fut et reste très controversée. Les dirigeants des grandes puissances européennes de l’époque, ceux qui ont conçu, établi et mis en exécution le système du mandat étaient tous des hommes du 19e s., celui de la colonisation dans toute sa splendeur, qui n’ont pas vu ou voulu voir que la fin de la grande guerre 1914-1918 était aussi celle d’un monde révolu, que l’écroulement de quatre grands empires européens était aussi celui d’un système politique qui oppressait les peuples et les pays. Les mouvements nationalistes étaient en marche et rien ni personne ne pouvait dorénavant empêcher les peuples de réclamer et obtenir leur indépendance.

Au début de cet article, j’avais parlé de l’échec de la politique du mandat. En effet, il y eut échec sur plusieurs points essentiels :

  1. Echec sur l’exécution de la mission de la France, puissance mandataire, de mener à bien le pays sous mandat – la Syrie – à l’indépendance.
  2. Diviser la Syrie en plusieurs états autonomes, regroupés plus tard en un état dans les limites d’un tracé arbitraire des frontières, non conforme à la réalité géographique et historique du pays.
  3. Refuser à la Syrie et à son gouvernement local l’exercice en droit de ses prérogatives constitutionnelles et ce, malgré la promulgation du « Statut organique » des états du Levant sous mandat français le 22 mai 1930 par le Haut-commissaire Henri Ponsot.
    Signature du traite Franco Syrien, Septenmbre 1936  8 fevrier 1936, troubles a Homs
  4. Refuser à la Syrie son indépendance proclamée par la France Libre le 9 juin 1941, et son délégué au Levant le général Catroux.
  5. Évacuation définitive des troupes françaises le 23 juillet 1939 du Sandjak d’Alexandrette, territoire syrien placé sous mandat français, en faveur de la Turquie, prix à payer pour s’assurer la neutralité turque durant la Deuxième guerre mondiale.
  6. Politique monétaire et fiscale préjudiciable pour la Syrie, avec l’émission d’une monnaie locale en billets de banque liée au franc français.
  7. Enfin, échec de la France à mener une « politique arabe » cohérente, en refusant tout soutien au nationalisme arabe.

Toutefois, et malgré cet échec politique incontestable, il ne serait que justice d’accorder à la France un bilan positif dans son œuvre administrative, qui a laissé des traces profondes en Syrie jusqu’à nos jours.  

Modernisation d'Alep - 1930, Centrale Electrique Modernisation d'Alep - 1928 debut de construction du Serail

Le mandat a tout d’abord consolidé les bases de l’état moderne, instauré au temps du Royaume arabe de Fayçal. Dans ce but, le mandat a imposé son autorité grâce à l’armée, la gendarmerie et la police garants de l’ordre et de la sécurité. Ce dispositif, bien que répressif, fut toutefois accompagné d’une réforme de la justice et de sa pratique dans tout le pays, assurant calme et sécurité.

Dans d’autres domaines : santé et hygiène, cadastre, construction de routes, sédentarisation des nomades, augmentation des surfaces cultivées, mise en valeur de l’héritage archéologique, formation et mise sur pied de la future armée nationale : infanterie arabe, cavaliers tcherkess, escadrons druzes, légion arménienne. Toutes ces unités ont formé les « troupes spéciales » de l’armée du Levant, commandée par des officiers français.

 Autre domaine, et non le moins important, fut la culture et l’éducation étendues à des milieux socialement variés et en nombre relativement important.

L’enseignement dans les écoles fut dispensé avec rigueur et efficacité. Le même sérieux dans la formation des élèves et étudiants fut appliqué dans les écoles et instituts missionnaires et dans les écoles nationales et l’Université syrienne.

Les générations de Syriens, formés dans ces écoles et maîtrisant souvent parfaitement à la fois l’arabe et le français, ont formé l’élite cultivée qui a mené le pays à l’indépendance et consolidé les réalisations positives du mandant durant la décennie postérieure à l’indépendance. Beaucoup de ceux qui ont vécu le mandat, qu’ils soient français ou syriens, gardent en mémoire des souvenirs contrastés et inoubliables. Toutefois, ils sont tous à peu près d’accord sur un point : le mandat fut une réussite administrative et un échec politique.

Dans la mémoire collective il est rare aujourd’hui de trouver en France quelqu’un qui se souvienne encore de cette période. Quant aux jeunes générations de Français, ils ignorent complètement que la Syrie faisait partie à une certaine période de l’empire français. En effet, sitôt achevé le mandat, la Syrie a sombré dans l’oubli des Français. À cela il y a peut-être plusieurs raisons :

-          L’échec global sur le plan politique et le prix élevé en hommes et en crédits.

-          Succession de drames, comme la guerre fratricide en 1941 qui oppose les troupes françaises sous commandement du général Dentz, fidèles à Vichy, aux forces britanniques et les forces françaises libres, commandées par le général Catroux.

-          En 1939, annexion par les Turcs du sandjak d’Alexandrette. L’évacuation de ce territoire par les troupes françaises est très mal perçue par les Syriens, s’estimant trahis par l’état mandataire accusé d’avoir marchandé une partie du territoire national.

-          En 1945, le général Oliva-Roget fait bombarder Damas et son Parlement. Cet acte inconsidéré, qui cause la mort de plusieurs centaines de civils, fait réagir les Anglais qui neutralisent les troupes françaises. Humiliation cuisante à laquelle succède une non moins cruelle humiliation : l’expulsion sans ménagement des Français de Damas. Le naufrage du mandat est consommé dans la honte.

  Alep 13 Aout 1942 - De Gaulle passe en revue les troupes

-          Enfin, et pour couronner le tout, plusieurs anciens commandants en chef de l’armée du Levant : Dentz, Huntziger, Gamelin, Mittelhauser sont traduits en France à la fin de la guerre en Haute cour et insculpés de trahison.

En dehors des troubles et des tensions politiques qui ont jalonné la période du mandat, le pays a évolué assez vite vers la modernité et le développement, sans bouleversement ou crise majeure. Des transformations lentes mais durables sont intervenues dans la société au niveau des mentalités et des modes de vie. La France de l’entre-deux guerres était encore une grande puissance et représentait pour beaucoup de peuples un modèle de civilisation, de culture et de savoir-vivre. Les Syriens, ouverts et tolérants par nature, qui avaient largement contribué dans l’Antiquité à créer l’Hellénisme, ont assimilé sans problème cette culture qui leur était offerte, recréant pour quelques décennies dans les grandes villes du Levant : Beyrouth, Damas, Alep et dans une moindre mesure à Lattaquié, un mode de vie propre au Levant : douceur de vivre méditerranéenne et mélange de culture arabo-française, ouverte sur l’Occident.

Grands hôtels, restaurants et cafés, cinémas et théâtres, boîtes de nuit et cabarets, ont apporté un nouveau visage à la vie citadine. Emancipation des femmes (ou de certaines d’entre elles) qui accèdent aux diplômes universitaires et à certains aspects de la vie politique ou professionnelle, sans pour cela vouloir choquer les usages ou la morale traditionnels.

Evolution du costume, surtout dans les villes ou fonctionnaires, employés, et nombre de citadins s’habillant à l’occidentale. Mais les hommes se couvrent toujours la tête du tarbouch. Les femmes de la bourgeoisie prennent pour modèle le chic parisien.

Création de plusieurs partis politiques, de plusieurs journaux et de cercles littéraires. Les activités sportives sont en plein développement et dans certains clubs où réunions familiales on danse le tango et le charleston. Grâce au gramophone on entend chanter autant les grands artistes égyptiens, Abdel Wahab et Oum Koulsoum, que français, Tino Rossi et Joséphine Baker.

 Le plan Ecochard - Le plan Ecochard

L’architecte Michel Écochard établit les plans pour l’urbanisation et la modernisation de Damas, organise les chantiers de restauration et de conservation des monuments historiques et réalise la construction du musée archéologique de Damas. Les habitants de Damas se rendent à leurs occupations journalières à pied, en calèche tirée par deux chevaux, à bicyclette ou en tramway. Bref, la vie va son train, souvent sans heurts et sans tensions. En société, les deux populations syrienne et française se fréquentent rarement en dehors des manifestations officielles.

Fait significatif de l’esprit tolérant des syriens : presque tous les fonctionnaires locaux ayant servi dans l’administration mandataire sont reconduits après l’indépendance dans leur fonction et assurent la transition. Ils n’ont jamais été traités de « collaborateurs » !  

La residence du haut commisaire, actuellement l'embassade de France

Damas, le 15 mars 2003

*** *** ***

 

Chronologie
quelques dates et événements importants

 

 

1914

3 août : Début de la Première guerre mondiale.

1915

août : Répression de Djémal Pacha, à Damas et à Beyrouth, contre les nationalistes arabes.

1916

Oct. : Début correspondance MacMahon-Shérif Hussein.

janv. : Accord équivoque MacMahon-Hussein.

avril-mai : Djémal Pacha exécute à Beyrouth et à Damas des nationalistes arabes, chrétiens et musulmans.

9-16 mai : Accords Sykes-Picot à Londres.

5 juin : Appel à la révolte arabe lancé par le shérif Hussein de la Mecque.

nov. : Le shérif Hussein se proclame « roi des Arabes ».

1917

11 mars : Prise de Bagdad par les Anglais.

6 juillet  : Prise d’Akaba par les Arabes révoltés ; le major Lawrence organise les raids.

2 nov. : Déclaration Balfour (foyer national juif en Palestine).

1918

3 oct. : Entrée de Fayçal à Damas.

26 oct. : Entrée à Alep des forces britanniques et chérifiennes.

1919

18 janv. : Ouverture de la conférence de paix à Paris.

28 juin : Signature du traité de Versailles et du pacte de la Société des Nations.

2 juillet : Réunion d’un Congrès national syrien à Damas.

1920

8 mars : Le Congrès syrien proclame l’indépendance de la Syrie.

24-25 avril : Accord de San Remo franco-britannique sur les pétroles et sur l’attribution des mandats.

14 juillet : Ultimatum du général Gouraud à Fayçal.

24 juillet : Défaite de l’armée chérifienne à Maysaloun.

25 juillet : Entrée des troupes françaises à Damas.

10 août : Traité de Sèvres avec l’Empire ottoman.

14 sept. : Proclamation à Beyrouth par Gouraud de la création du Grand-Liban.

24 mars : Installation de l’émir Abdallâh en Transjordanie.

23 août : Fayçal proclamé roi à Bagdad.

1922

3 fév. : Accord Paulet-Newcomb sur la définition de la frontière syro-libano-palestinienne.

24 juillet : La société des Nations promulgue la charte du mandat syro-libanais.

1923

15 mai : Proclamation de l’indépendance de l’Émirat de Transjordanie dirigé par Abdallâh.

1924

13 oct. : Ibn Séoud renverse Hussein et s’empare de la Mecque.

1925

14 janv. : Soubhi Bey Barakat devient président du nouvel état de Syrie, fusion des états d’Alep et de Damas.

18 juillet : Début de l’insurrection druze.

12-20 oct. : L’insurrection s’étend à Damas. Bombardement de Damas.

21 déc. : Démission de Soubhi Barakat.

1926

23 mai : Promulgation de la Constitution libanaise.

Juin : Le pouvoir en Syrie est remis au Damad Ahmad Namy Bey.

26 juillet : Fin de l’insurrection en Syrie.

1928

8 février : Démission du Damad. Le pouvoir est confié au cheikh Tageddine.

9 juin : Réunion de l’Assemblée constituante syrienne à Damas.

1929

5 fév. : Ajournement sine die par le Haut-commissaire H. Ponsot de l’Assemblée constituante syrienne.

1930

3 mai : Protocole final d’abornement de la frontière syro-turque.

22 mai : Henri Ponsot promulgue le « Statut organique » des états du Levant sous mandat français.

1931

19 nov. : Le cheikh Tageddine démissionne.

1932

7 juin : Moh. Ali Bey Abed est élu Président de la république.

25 nov. : Approbation par la S.D.N. de la frontière syro-irakienne.

1933

8 sept. : Mort du roi Fayçal. Son fils Ghazi lui succède sur le trône de l’Irak.

1934

2 nov. : Le Haut-commissaire Damien de Martel suspend sine die la Chambre syrienne.

1936

10 janv. : Manifestation de l’Université de Damas. Suivent plusieurs jours d’émeutes en Syrie et 60 jours de grève générale.

Mars-mai : À Paris, première phase des pourparlers franco-syriens sur le projet de traité.

17 avril : Vaste insurrection arabe en Palestine.

28 avril : Farouk succède à Fouad comme roi d’Égypte.

3 mai : Victoire du Front populaire en France.

20 juin : La France confirme les frontières du Liban.

25 juin : Le président de la délégation syrienne à Paris, Hachem al-Atassi remet une lettre qui remet en cause les frontières libanaises.

9 sept. : Cérémonie du paraphe du traité franco-syrien dans le salon de l’Horloge du Ministère des affaires étrangères à Paris.

30 nov. : Les élections en Syrie assurent le succès des nationalistes.

2 déc. : Arrêté de rattachement du Djebel Druze à la Syrie.

5 déc. : Arrêté de rattachement de l’État des Alaouites à la Syrie.

22 déc. : Réunion du Parlement syrien. Élection de Hachem al-Atassi à la présidence de la république, formation du cabinet Djamil Mardam Bey.

26 déc. : Ratification du traité franco-syrien par le Parlement syrien.

1937

7 juillet : À Londres, la Commission royale d’enquête se prononce pour la partition de la Palestine en un état juif et un état arabe, avec maintien du mandat britannique sur Jérusalem.

Juillet : Agitation autonomiste à Hassaké (Djezireh) en Syrie.

1938

5 juillet : Entrée des troupes turques dans le sandjak d’Alexandrette et instauration de la loi martiale.

2 sept. : Élection de Taifour Sukmen à la présidence du sandjak d’Alexandrette qui devient le « Hatay ».

18 oct. : Journées d’émeutes en Galilée, Palestine. Les Britanniques instaurent la loi martiale. Le Grand mufti de Jérusalem, Hadj Amin al-Husseini, se réfugie au Liban.

15 nov. : En Turquie, Ismet Inönü succède à Mustapha Kemal.

Fin nov. : Obstruction au parlement français à la ratification du traité franco-syrien.

24 déc. : Coup d’état militaire en Irak. Rashid Ali s’empare du pouvoir.

1939

19 fév. : Démission à Damas du cabinet Mardam Bey et formation du ministère Loutfi Haffar.

11-19 mars : Fermeture des souks et agitation à Damas lors de la visite du nouveau Haut-commissaire Gabriel Puaux. Manifestations religieuses contre l’arrêté sur le statut personnel. Sanglantes bagarres entre le bloc National et les partisans du docteur Chahbandar.

3 avril : Fayçal II, âgé de 5 ans, succède à son père Ghazi 1er, tué dans un accident d’auto. L’Emir Abdu-l-Ilah est nommé régent.

Avril : Formation du cabinet Boukhari à Damas, qui démissionne le 15 mai.

28 juin : Accord franco-turc : Le Hatay est annexé à la Turquie.

8 juillet : Démission du président Atassi. Dissolution du Parlement syrien, suspension de la constitution et formation d’un cabinet à caractère administratif confié à Behij Bey Khatib.

2 sept. : Commencement de la Deuxième guerre mondiale. Proclamation de l’état de siège au Levant.

1940

17 juin : Constitution du gouvernement Pétain et demande d’armistice.

5 août : Les puissances de l’Axe promettent la reconnaissance de l’indépendance des Arabes moyennant une révolte anti-britannique en Irak, en Palestine et en Transjordanie.

7 déc. : Le général Dentz est nommé Haut-commissaire.

1941

3 avril : Coup d’état irakien pro-allemand de Rachid Ali al-Keilani.

4 avril : Au Liban, démission du président Émile Eddé.

14-16 mai : Bombardement des aérodromes de Palmyre, Damas et Ryak par l’aviation anglaise.

31 mai : Les Anglais entrent à Bagdad. Al-Keilani est en fuite.

8 juin : Les troupes britanniques et les Forces françaises libres pénètrent en Syrie. Début de la guerre du Levant.

9 juin : Déclaration commune du général Catroux et des autorités anglaises proclamant l’indépendance de la Syrie et du Liban.

20 juillet : Proclamation de l’état de siège en Syrie et au Liban.

27 juillet : Premier voyage du général De Gaulle à Beyrouth et à Damas.

9 sept. : Déclaration de W. Churchill à la Chambre des Communes : « L’indépendance sera restituée aux Syriens et aux Libanais sans attendre la fin de la guerre. »

19 sept. : Le cheik Tageddine est nommé Président de la république syrienne.

27 sept. : Proclamation de l’indépendance de la Syrie par le général Catroux et celle du Liban 27 nov. : Alfred Naccache est nommé président de la République.

1942

11 août-8 sept. : Voyage du général De Gaulle en Syrie et au Liban.

1943

16 janv. : Mort à Damas du cheikh Tageddine.

18-24 mars : Le général Catroux rétablit au Levant les systèmes constitutionnels et promet la négociation des traités.

21 juillet : Démission d’Alfred Naccache à Beyrouth.

26 juillet : Élections syriennes. Succès nationaliste. Choukry al-Kouatly devient Président de la république. Le Cabinet est formé par Saadullah al-Jabri avec Djamil Mardam Bey aux Affaires étrangères.

29 août-19 sept. : Élections libanaises. Bechara al-Khoury devient Président de la république, Riad as-Solh, président du Conseil.

11 nov. : Incidents à Beyrouth et Tripoli. Jean Helleu, délégué général par intérim, fait établir le couvre-feu et arrêter le président de la république, le président du conseil et plusieurs ministres.

12-16 nov. : Protestations des autorités britanniques, égyptiennes, saoudiennes, irakiennes et trans-jordaniennes.

16 nov. : Retour du général Catroux à Beyrouth. Rappel de Jean Helleu et rétablissement dans leurs fonctions des hommes politiques libanais emprisonnés.

22 déc. : Signature d’accords prévoyant le transfert, à partir du 1er janvier 1944, aux autorités syriennes et libanaises, les attributions exercées en leur nom par la France.

1944

10 janv. : Transmission aux états de Syrie et du Liban des services d’intérêt commun de la police, des passeports, de la presse et des postes.

5 fév. : Transfert aux autorités syriennes et libanaises des services financiers et économiques.

10 fév. : Le général Beynet est nommé Délégué général à Beyrouth, le diplomate Ives Chataigneau ayant assuré l’intérim depuis le départ de Jean Helleu.

mars-sept. : L’Arabie Saoudite (29 mars), le Yémen (21 avril), la Chine (10 mai), la Transjordanie (31 mai) et l’Iran (23 septembre) reconnaissent l’indépendance de la Syrie et du Liban.

25 sept.-10 oct. : Congrès général arabe à Alexandrie. Signature d’un protocole d’accord prévoyant la création d’une Ligue des états arabes.

16 oct. : Démission du gouvernement syrien. Formation à Damas du cabinet Faress al-Khoury.

1945

10 mai : Émeutes à Damas. Les escadrons druzes et la gendarmerie syrienne font défection.

16 mai : Débarquement à Beyrouth de renforts de troupes françaises.

27 mai : Attaque et destruction d’un convoi militaire français à Homs.

28 mai : Harcèlement des postes français par la gendarmerie syrienne, équipée d’armes anglaises.

29 mai : Le général Beynet fait bombarder les édifices publics à Damas. Le gouvernement syrien quitte la capitale.

30 mai : Ultimatum britannique remis à l’ambassadeur français René Massigli à Londres. Paris donne l’ordre de cessez-le-feu.

14 juin : Entrée spectaculaire à Beyrouth du général Paget, Commandant en chef britannique en Orient.

1946

20 janv. : Le général De Gaulle démissionne de la présidence du gouvernement provisoire.

14 fév. : Le Conseil de sécurité des Nations unis discute la demande syro-libanaise d’un retrait total des troupes étrangères.

30 avril : Évacuation de la Syrie par les dernières troupes françaises.

31 août : Évacuation du Liban par les dernières troupes françaises.

***

1. Chefs des gouvernements syriens du 27 septembre 1918 au 11 juin 1932.

1918

27-30 sept. : l’Émir Saïd al-Jazairi

1918-1920 : 30/9/18-26/1/20 : Rida Pacha al-Rikabi

1920 :

26 janv.-8 mars : l’Émir Zaïd Ibn al-Hussein

9 mars-3 mai : Rida al-Rikabi (2)

3-5 mai : Hachem al-Atassi

5 mai-24 juillet : Hachem al-Atassi (2)

juillet : Ala’ al-Droubi

6 sept.-30 nov. : Jamil al-Ilchi

1920-1922 : 1er déc. 20- 28 juin 22 : Hakki al-Azem

1922-1924 : 28 juin 22-10 déc. 24 : Soubhi Barakat

1924-1925 : 10 janv. 24-31 août 25 : Soubhi Barakat (2)

1925 : 31 août-21 déc. : Soubhi Barakat (3)

1926 : 9 fév.-26 avril : le Français Pierre Alype

26 avril-12 juin : Damad Ahmad Nami

12 juin-2 déc. : Damad Ahmad Nami (2)

1926-1928 : 2 déc. 26-8 fév. 28 : Damad Ahmad Nami (3)

1928-1930 : 15 fév. 28-14 août 30 : Cheikh Taj al-Hassani

1930 : 14 août-27 oct. : Cheikh Taj al-Hassani (2)

1930-1931 : 27oct 30-19 nov. 31 : Cheikh Taj al-Hassani (3)

1931-1932 : 19 nov. 31-11 juin 32 : le Français Léon Solomiac.

***

2) Présidence de la République syrienne du 11 juin 1932 au 29 mars 1949

Première présidence :

Président de la république : Mohammad Ali al-Abed (11 juin 1932-14 novembre 1936)

Chef du gouvernement :

-          Hakki al-Azem : 15/6/1932-3/5/1933

-          Hakki al-Azem (2) : 3/5/1933-7/3/1934

-          Cheikh Taj al-Hassani : 17/3/1934-24/2/1936

-          Ata al-Ayoubi : 24/2/1936-21/12/1936

Deuxième présidence :

Président de la république : Hachem al-Atassi (15 novembre 1936-7 juillet 1939)

Chef du gouvernement :

-          Jamil Mardam Bey : 21/12/1936-26/7/1938

-          Jamil Mardam Bey (2) : 26/7/1938-23/2/1939

-          Loutfi al-Haffar : 23/2/1939-5/4/1939

-          Nassouhi al-Boukhary : 5/4/1939-8/7/1939

Gouvernements administratifs de transition :

Président Bahij al-Khatib : 9/7/1939-1/4/1941

Président Khaled al-Azem : 5/4/1941-12/9/1941

Troisième présidence :

Président de la république cheikh Tajeddin al-Hassani (non élu, mais désigné par le général Catroux) : 12 sept 1941-17 janvier 1943

Chef du gouvernement :

-          Hassan al-Hakim : 20/9/1941-17/4/1942

-          Housni al-Barazi : 18/4/1942-8/1/1943

-          Jamil al-Ilchi : 8/1/1943-25/3/1943 (Chef de l’état à la mort du président al-Hassani en janvier 1943)

-          Ata al-Ayoubi 25/3/1943-Août 1943 (Chef de l’Etat)

Quatrième présidence :

Président de la République Choukri al-Kouatly : 17 août 1943 – renversé par coup d’état militaire du colonel Housni al-Zaïm le 29 Mars 1949

Chef de gouvernement :

-          Sa’adallah al-Jabiri : 19/8/1943-14/11/1944

-          Faress al-Khoury : 14/11/1944-7/4/1945

-          Faress al-Khoury (2) : 7/4/1945-24/8/1945

-          Faress al-Khoury (3) : 24/8/1945-30/9/1945

-          Sa’adallah al-Jabiri : (2) 30/9/1945-27/4/1946

-          Sa’adallah al-Jabiri : (3) 27/4/1946-27/12/1946

-          Jamil Mardam Bey : 28/12/1946-6/10/1947

-          Jamil Mardam Bey (2) : 6/10/1947-22/8/1948

-          Jamil Mardam Bey (3) : 22/8/1948-16/12/1948

-          Khaled al-Azem : 16/12/1948-29/3/1949

*** *** ***

Bibliographie

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-          Fournier, Pierre et Jean Louis Riccioli, La France et le Proche-Orient (1916-1946), Casterman

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-          Perrin-Naffakh, Anne-Marie, Syrie, Petite Planète.

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-          Rioux, Jean-Pierre, Fins d’empires, Plon.

-          Rondot, Philippe, La Syrie, Coll. « Que sais-je ? », Presses Univ. de France.

-          Rondot, Pierre, Les Chrétiens d’Orient, J. Peyronnet et Cie Éditeurs.

-          Samman, Mouti‘, Watan wa ‘askar, Bisān.

-          Tlass, Moustapha et Joseph Hajjar, L’histoire politique de la Syrie contemporaine (1918-1920), Tlassdar.

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-          Wilson, Jeremy, Lawrence d’Arabie, Denoël.

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