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LA VOIX DU SILENCE
TRAITE MYSTIQUE TIBETAIN –TRADUIT ET ANNONCE PAR

Helena Petrovna Blavatsky

 

FRAGMENT III
LES SEPT PORTAILS – DEUXIEME PARTIE

 

… L'intrépide guerrier, qui perd le sang précieux de sa vie par ses blessures larges et béantes, attaquera encore l'ennemi, le chassera de sa place forte et le vaincra, avant d'expirer lui-même. Faites donc comme lui, vous tous qui échouez et souffrez : de la forteresse de votre Âme boutez dehors tous ces ennemis - ambition, colère, haine, et jusqu'à l'ombre du désir - lors même que vous auriez échoué . . .

Souviens-toi, ô toi qui combats pour la libération[1] de l'homme, que chaque échec est un succès, et que toute tentative sincère aura, en son temps, sa récompense. Les germes sacrés qui, invisiblement, poussent et croissent dans l'âme du disciple, fortifient leurs tiges à chaque nouvelle épreuve ; elles se plient comme des roseaux mais jamais ne se rompent et jamais ne peuvent être perdues. Mais, quand l'heure a sonné, vient leur floraison[2]. ....

Cependant, si tu es venu préparé, n'aie aucune crainte. .....

Désormais la route est dégagée pour toi, droit par la porte de Vîrya, le cinquième des Sept Portails.

Tu es maintenant sur la voie qui mène au hâvre de Dhyâna, le sixième Portail, celui de Bodhi.

La porte de Dhyâna est semblable à un vase d'albâtre, blanc et transparent; à l'intérieur, brûle un invariable feu d'or, la flamme de Prâjña qui rayonne d'Âtman.

Tu es ce vase.

Tu t'es coupé de tout objet des sens, tu as cheminé sur le « Sentier de la vue » , le « Sentier de l'ouïe » , et voici que tu te tiens dans la lumière de la Connaissance. Maintenant tu as atteint l'état de Titiksha[3].

Ô Naljor, tu es en sûreté.

Sache, ô vainqueur des péchés, que dès qu'un Sowân[4] a franchi le septième Sentier, toute la Nature, saisie d'une crainte sacrée, tressaille de joie et se sent soumise. Voici que l'étoile argentée transmet en scintillant la nouvelle aux fleurs nocturnes ; le ruisselet chuchote l'histoire aux cailloux ; les vagues sombres de l'océan la mugissent sans fin aux récifs, tandis que les brises chargées de parfums la chantent aux vallons, et que les pins majestueux mystérieusement murmurent : « Un Maître s'est levé, UN MAITRE DU JOUR. »[5]

II se dresse maintenant à l'Occident comme un blanc pilier, sur la face duquel le Soleil levant de l'éternelle pensée répand ses premières ondes les plus glorieuses. Dans l'espace illimité, son mental s'étend comme un océan apaisé et sans bornes. Il tient la vie et la mort dans sa main vigoureuse.

En vérité, il est puissant. Le pouvoir vivant qui a été libéré en lui - ce pouvoir qui est LUI-MÊME - peut élever le tabernacle d'illusion bien au-dessus des Dieux, plus haut que le grand Brahm et Indra. Maintenant il obtiendra sûrement sa grande récompense!

N'emploiera-t-il pas les dons qu'elle lui confère pour son propre repos et sa félicité, son bonheur bien gagné et sa gloire méritée, lui qui a vaincu la Grande Illusion ?

II ne saurait en être ainsi, ô candidat à la science cachée de la Nature ! Pour qui désire marcher dans les pas du saint Tathâgata, ces dons et ces pouvoirs ne sont pas pour Soi.

Voudrais-tu ainsi endiguer les eaux nées sur le Sumeru[6]? Détourneras-tu le courant pour ton bénéfice, ou le renverras-tu à la source première tout au long de la crête des cycles ?

Si tu veux que ce courant de Connaissance durement acquise, de Sagesse née du ciel, demeure une eau douce et vive, tu ne dois pas le laisser devenir un marais stagnant.

Apprends que si d'Amitâbha, « l'Âge sans Borne » , tu veux devenir l'auxiliaire, il te faudra, comme ses deux Bodhisattva[7], répandre la lumière acquise sur l'étendue des trois mondes[8].

Apprends que le courant de Connaissance surhumaine et de Sagesse-deva que tu auras gagnées devra être déversé de toi-même, canal d'Âlaya, dans un autre lit.

Apprends, ô Naljor, toi qui suis le Sentier Secret, que ses eaux pures et fraîches doivent servir à rendre plus doux les flots amers de l'Océan, cette puissante mer de douleur faite des larmes des hommes.

Hélas ! Dès que tu seras devenu semblable à l'étoile arrêtée au plus haut du ciel, il faudra que ce brillant orbe céleste luise des profondeurs de l'espace pour tous, sauf pour lui-même, et donne de la lumière à chacun mais n'en prenne à personne.

Hélas ! Devenu pareil à la pure neige des vallées de montagne - froide et insensible au toucher, mais chaude et protectrice pour la semence qui dort profondément dans son sein - c'est cette neige désormais qui devra recevoir la gelée mordante et les rafales de vent du nord, en abritant ainsi de leurs dents aiguës et cruelles la terre qui garde la moisson promise, la moisson qui nourrira les affamés.

Volontairement condamné à vivre à travers les Kalpa[9] futurs, loin des regards et de la reconnaissance des hommes, assujetti comme une pierre entre les autres pierres sans nombre qui forment le « Mur Gardien »[10], tel est ton avenir si tu passes la septième Porte. Construit par les mains de nombreux Maîtres de Compassion, érigé par leurs tortures, par leur sang cimenté, ce mur abrite le genre humain depuis que l'homme est homme et le protège contre des misères et douleurs potentielles encore plus grandes.

Cependant l'homme ne le voit pas ; généralement, il ne s'en rend pas compte, pas plus qu'il ne prend garde à la parole de la Sagesse . . . car il ne la connaît pas.

Toi, cependant, tu l'as entendue, tu en as toute la connaissance, ô toi à l'Âme ardente et sans péché. . . et tu dois choisir. Cependant écoute encore.

Sur le Sentier du Sowân, tu es sûr de ta route, ô Srotâpanna[11]. En vérité, sur ce Mârga[12] où le pèlerin éprouvé ne rencontre que ténèbres, où les mains saignent, déchirées par les ronces, où les pieds sont entaillés par de durs silex tranchants, et où Mârâ déploie ses armes les plus puissantes, il y a en réserve une grande récompense immédiatement au-delà.

Aussi, calme et immuable, le pèlerin va et remonte le courant conduisant au Nirvâna. Il sait que plus ses pieds saigneront, plus il sera lui-même blanchi. Il sait bien qu'après sept courtes et fugitives naissances Nirvâna sera sien . . .

Tel est ce Sentier de Dhyâna, le hâvre du Yogi, le but final béni que convoitent les Srotâpanna.

Mais il n'en est pas de même pour le pèlerin qui franchit le Sentier Arahatta[13] et en gagne le fruit.

Là, Klesha[14] est à jamais détruit, les racines de Tanhâ[15] sont arrachées. Mais arrête-toi, disciple . . . Encore un mot. Peux-tu détruire la divine COMPASSION ? La Compassion n'est pas un attribut. C'est la LOI des LOIS, l'Harmonie éternelle, le SOI d'Âlaya ; essence universelle et sans rivages, c'est la lumière de l'immuable Justice et de l'harmonieuse disposition de chaque chose dans le tout, la loi de l'éternel Amour.

Plus tu t'unifieras avec elle, ton être se fondant dans son ÊTRE, plus ton Âme s'unira avec ce qui EST, plus tu deviendras COMPASSION ABSOLUE[16].

Tel est le Sentier Ârya, le Sentier des Bouddhas de perfection.

En outre, que signifient les manuscrits sacrés qui te font dire :

« OM ! Je crois que tous les Arhat ne reçoivent pas les doux fruits du Sentier du Nirvâna. »

« OM ! Je crois que tous les Bouddhas[17] n'entrent pas au Nirvâna-Dharma. »

En vérité, sur le Sentier Ârya, tu n'es plus Srotâpanna, tu es devenu Bodhisattva[18]. Le courant a été remonté. Il est vrai que tu as droit au vêtement Dharmakâya ; mais un Sambhogakâya est plus grand qu'un Nirvâni - et plus grand encore est un Nirmânakâya, le Bouddha de Compassion[19].

Maintenant, courbe la tête et écoute attentivement, ô Bodhisattva. La Compassion parle et dit : « Peut-il y avoir béatitude quand tout ce qui vit doit souffrir ? Seras-tu sauvé et entendras-tu le monde entier gémir ? »

Ainsi, tu as entendu ce qui fut dit.

Tu n'atteindras le septième degré et ne franchiras la porte de l'ultime Connaissance que pour épouser la douleur : si tu veux être Tathâgata, marche dans les pas de tes prédécesseurs, reste sans égoïsme jusqu'à la fin sans fin.

Tu es éclairé : choisis ton chemin.

Regarde la douce lumière qui inonde le ciel d'Orient. En signe de louange, les cieux et la terre s'unissent ; et des quadruples Pouvoirs manifestés s'élève un chant d'amour, du Feu flamboyant et de l'Eau fluide, de la Terre odorante et du Vent impétueux.

Écoute !... Des profondeurs de l'insondable tourbillon de cette lumière d'or où baigne le Vainqueur, la voix sans paroles de TOUTE LA NATURE s'élève en mille accents pour proclamer :

JOIE À VOUS, Ô HOMMES DE MYALBA[20].
UN PÈLERIN EST REVENU " DE L'AUTRE RIVE "
UN NOUVEL ARHAT[21] EST NÉ. .
PAIX À TOUS LES ÊTRES[22].

*** *** ***


 

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[1] Allusion à la croyance courante en Orient (qui a d'ailleurs sa correspondance en Occident) que chaque nouveau Bouddha (ou chaque nouveau Saint) est un Soldat de

 plus dans l'armée de ceux qui œuvrent à la libération ou au salut du genre humain. Dans les pays pénétrés par le bouddhisme du Nord est enseignée la doctrine des Nirmânakâya qui sont de ces Bodhisattva qui renoncent à un Nirvâna bien gagné, ou au « vêtement Dharmakâya » (ce qui dans chaque cas les couperait à jamais du monde des hommes), afin de pouvoir rester à aider invisiblement l'humanité et la conduire finalement jusqu'au Paranirvâna. Dans ces pays, chaque nouveau Bodhisattva, ou grand Adepte initié, est appelé « libérateur du genre humain » . L'affirmation de Schlagintweit (dans son ouvrage Le Bouddhisme au Tibet, [p. 26] ) que le Proulpai Ku [Tulpa' i-ku] , ou Nirmânakâya, est « le corps dans lequel les Bouddhas ou Bodhisattvas apparaissent sur la terre pour instruire les hommes » est absurdement inexacte, et n'explique rien.

[2] Allusion aux passions et aux péchés humains qui sont exterminés durant les épreuves du noviciat, et qui servent de terrain bien fertilisé où peuvent pousser

 les « germes sacrés » ou semences des vertus transcendantes. Les vertus, talents ou dons préexistants, ou innés, sont considérés comme ayant été acquis dans une naissance précédente. Le génie est sans exception un talent ou une aptitude provenant d'une autre existence.

[3] Titiksha est le cinquième état du Râja Yoga, état d'indifférence suprême et, si nécessaire, de soumission à ce qui pour tous est appelé « plaisir et douleur » ,

 sans toutefois éprouver joie ou souffrance par une telle soumission. En résumé, c'est la condition où l'on est devenu physiquement, mentalement et moralement, indifférent et insensible au plaisir comme à la douleur.

[4] Sowân, mot [cingalais] équivalent au sanskrit Srotâpanna pour désigner celui qui pratique le premier sentier de Dhyâna.

[5] Ce « Jour » a ici le sens d'un Manvantara entier, soit une période d'une durée incalculable.

[6] Le mont Meru, la montagne sacrée des Dieux.

[7] Dans le symbolisme du bouddhisme du Nord, Amitâbha, représentant « l'Espace infini » (Parabrahman) passe pour être entouré dans son paradis de deux

Bodhisattva - Kuan-Shih-Yin et Ta-Shih-Chi - qui rayonnent sans cesse la lumière sur les trois mondes (voir note suivante) où ils ont vécu, y compris le nôtre, afin d'aider, avec cette lumière (de la connaissance), à l'instruction des Yogis destinés à leur tour à sauver les hommes. Dans cette allégorie, leur position très élevée dans le domaine d'Amitâbha est due aux actes de miséricorde qu'ils ont accomplis l'un et l'autre comme Yogis, lorsqu'ils étaient sur terre.

[8]Ces trois mondes sont les trois plans de l'être : terrestre, astral et spirituel.

[9] Les cycles des âges.

[10]À propos de ce « Mur Gardien » , ou « Mur de Protection » , il est enseigné que les efforts accumulés par de longues générations de Yogis, de Saints et d'Adeptes,

surtout de Nirmânakâya, ont, pour ainsi dire, créé un mur protecteur autour du genre humain, mur invisible qui abrite l'humanité souffrante de calamités encore plus terribles.

[11]Sowân et Srotâpanna sont des termes synonymes [cf. note 4].

[12] Mârga : « Sentier. »

[13] [Pâli : Arahattamagga.] À rattacher au sanskrit Arhat.

[14] Klesha : l'amour du plaisir ou des jouissances terrestres (bonnes ou mauvaises).

[15] Tanhâ : la volonté de vivre, cause des renaissances.

[16] La « Compassion » en question ne doit pas être envisagée sous le même jour que « Dieu, l'amour divin » des religions monothéistes. Elle représente ici une loi

abstraite et impersonnelle, dont la nature (qui est Harmonie absolue) est jetée dans la confusion par la discorde, la souffrance et le péché.

[17] Voir le texte [tibétain] d'un Thegpa Chenpo'i-do {sûtra du Mahâyâna) qui est une « Invocation aux Bouddhas de Confession » (lère partie, IV) [Schlagintweit,

 Le Bouddhisme au Tibet, pp. 77-80]. Dans la terminologie des bouddhistes du Nord, tous les grands Arhat, Adeptes et Saints, sont appelés des Bouddhas.

[18]Un Bodhisattva est moins élevé dans la hiérarchie qu'un « Bouddha parfait » . Dans le langage exotérique, ces deux termes sont souvent confondus. Cependant,

le sens populaire, inné et juste, a placé le Bodhisattva plus haut, comme objet de vénération, qu'un Bouddha, en raison du sacrifice qu'il s'est imposé.

[19] Cette même vénération populaire appelle « Bouddhas de Compassion » les Bodhisattva qui ont le rang d'Arhat (c'est-à-dire qui ont complètement parcouru

 le quatrième ou le septième Sentier), mais refusent d'entrer dans l'état de Nirvâna ou d' « endosser la robe Dharmakâya et d'atteindre ainsi à l'autre rive » , car alors ce serait au-delà de leur pouvoir d'assister les hommes, même dans la faible mesure où Karma le permet. Ils préfèrent rester invisibles (en Esprit, pour ainsi dire) dans le monde et contribuer au salut des hommes, en les incitant à suivre la Bonne Loi, c'est-à-dire en les guidant sur le Sentier de la Droiture. Le culte rendu à tous ces grands personnages comme à des Saints, et même les prières qui leur sont offertes, font partie de l'aspect exotérique du bouddhisme du Nord - tout comme les fidèles des Églises grecque et catholique honorent leurs Saints et leurs Patrons. Par contre, les enseignements ésotériques n'encouragent nullement de telles pratiques. Et il y a une grande différence entre les deux approches doctrinales. Le laïc, qui suit le système exotérique, n'a guère idée du sens réel du mot Nirmânakâya. D'où la confusion et les explications inadéquates des orientalistes. Par exemple, Schlagintweit croit que le corps Nirmânakâya désigne la forme physique que prennent les Bouddhas quand ils s'incarnent sur terre -ce serait « le moins sublime » de leurs « embarras terrestres » (cf. Le Bouddhisme au Tibet, [p. 261). Et il continue en donnant une vue entièrement fausse du sujet. Cependant voici le véritable enseignement : Les trois corps ou formes du Bouddha sont appelés

-          I:  Nirmânakàya,

-          II: Sambhogakâya,

-          III: Dharmakâya.

Le premier est la forme éthérée que l'on prendrait si, en quittant son corps physique, on apparaissait dans son corps astral - à condition de posséder en outre toute la connaissance d'un Adepte. Le Bodhisattva développe cette forme en lui-même à mesure qu'il avance sur le Sentier. Quand il a atteint le but et refusé son fruit, il reste sur terre comme un Adepte ; à sa mort, au lieu d'aller en Nirvâna, il demeure dans ce corps glorieux qu'il a lui-même tissé à son usage, comme une présence invisible à l'humanité non initiée, pour veiller sur elle et la protéger.
Le Sambhogakâya est le même corps de Bouddha, avec l'éclat supplémentaire que lui confèrent trois « perfections » , dont l'une est l'effacement complet de toute préoccupation terrestre.
Le corps Dharmakâya est celui d'un Bouddha accompli : en fait, ce n'est pas un corps du tout mais un souffle idéal ; la Conscience absorbée dans la Conscience ou Âme Universelle, privée de tout attribut. Une fois au niveau de Dharmakâya, l'Adepte ou le Bouddha abandonne derrière lui toute relation possible avec cette terre, ou toute pensée la concernant. Ainsi, en langage mystique, il est dit qu'un Adepte qui a gagné le droit au Nirvâna « renonce au corps Dharmakâya » afin de pouvoir aider l'humanité ; il ne garde du Sambhogakâya que sa grande et complète Connaissance, et demeure dans son corps Nirmânakâya. L'École ésotérique enseigne que Gautama le Bouddha (avec plusieurs de ses Arhat) est un tel Nirmânakâya : au-dessus de lui, en raison de son renoncement sublime et de son grand sacrifice pour l'humanité, il n'existe aucun exemple connu.

[20] Myalba est notre terre, appelée avec raison « Enfer » par l'École ésotérique, car c'est le plus grand des enfers. La doctrine ésotérique ne reconnaît aucun enfer,

ou lieu de punition, si ce n'est sur une planète, ou une terre, portant des hommes. Avîchi est un état et non une localité.

[21] C'est-à-dire qu'un nouveau Sauveur du genre humain est né, qui guidera les hommes jusqu'au Nirvâna final, une fois terminé le grand cycle de vie.

[22] Cette formule est l'une de celles qui suivent invariablement tout traité, toute invocation ou toute Instruction, comme : « Paix à tous les êtres » , « Bénédictions à

tout ce qui vit » , etc.

 

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